Suite à ces événements, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris dans une décision du 11 juillet 1985 vient prononcer le renvoi de l'individu qui a frappé le cadavre devant la Cour d'assises de l'Essonne sous l'accusation de tentative d'homicide volontaire. L'individu forme un pourvoi contre cette décision de renvoi.

Le prévenu renvoyé se défend en disant qu’il ne pouvait être accusé de tentative d'homicide volontaire, mais déjà pas par strangulation et la victime était déjà morte ce qu'il ignorait. Le 16 janvier 1986, dans l'arrêt Perdereau, on vient dire qu'il y a bien une tentative de meurtre, et c'est à cause d'une circonstance indépendante de la volonté de l'auteur - la victime était déjà morte - que l'infraction n'a pu être consommée. La chambre criminelle casse l'arrêt du 11 juillet 1985 précité, car dans l'arrêt on dit que ce sont les coups de bouteille sur le crâne de la victime et l'étranglement avec un lien torsadé qui constitue le commencement d'exécution or, ce serait les coups de barre de fer et la strangulation avec cette même barre de fer qui aurait constitué la tentative. Par conséquent, un renvoi est prononcé devant la chambre d'accusation d'Amiens.

La question de droit est la suivante : un individu qui exerce des actes de violence sur un être humain dans l'intention de lui donner la mort et qui ignore que cet être humain est déjà mort est-il l'auteur d'une tentative d'homicide volontaire ?

L'arrêt de la chambre criminelle du 16 janvier 1986 vient assimiler une infraction impossible à une tentative (I) et vient distinguer la tentative d'homicide volontaire de l'atteinte à l'intégrité du cadavre (II).

I. L'assimilation d'une infraction impossible à une tentative

L'infraction impossible apparaît pour la chambre criminelle comme une tentative (A), ce qui est critiquable (B).

A. L'infraction impossible vue comme une tentative
« Il n'importe, pour que soit caractérisée la tentative d'homicide volontaire, que la victime fut déjà décédée, cette circonstance était indépendante de la volonté de l'auteur et lesdites violences caractérisant un commencement d'exécution ». La chambre criminelle dit qu'il y a tentative d'homicide volontaire, car la mort de la victime ne dépendait pas de la volonté de l'auteur des violences. En fait, si on fait preuve de rigueur, on est obligé de constater que l'auteur des violences ne pouvait commettre un homicide volontaire ; on ne peut ôter la vie à un mort, il s'agit d'une infraction impossible. L'infraction impossible devient une tentative.

L'infraction impossible est assimilée à une tentative, c'est-à-dire à un commencement d'exécution sans que l'infraction soit consommée et du fait de circonstances indépendantes de l'auteur des violences. La chambre criminelle veut punir l'auteur des violences, si la formation de jugement avait caractérisé une infraction impossible, il aurait été impossible d'incriminer l'attitude de l'auteur des violences or, le juge n'a pas voulu encourager ce comportement, mais au contraire montrer que ce comportement n'était pas souhaitable en société. La décision qui assimile l'infraction impossible à une tentative n'en demeure pas moins l'objet de critique.

B. Une décision critiquable

La doctrine a relevé la faiblesse de cette assimilation entre la tentative et l'infraction impossible, parmi ces auteurs, on trouve :  D. Moyen, G. Gazounaud et Merle et Vitu. Cette décision souffre d'autres lacunes, parmi ces lacunes, cette décision constitue une négation du principe de légalité. Le principe de légalité est un principe essentiel du droit pénal, en fait, ce principe dit qu'il faut un texte pour incriminer un comportement, il s'agit d'un principe à valeur constitutionnelle, car il est inscrit dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. En effet, la loi ne punit pas un tel comportement, l'infraction impossible n'est pas visée à l'article 221-1 du Code pénal, la chambre criminelle est obligée de procéder à une assimilation pour pouvoir condamner l'individu qui a frappé le cadavre.

Leur condamnation au titre de la tentative donne lieu en quelque sorte à la répression d'une infraction putative, car on peut penser qu'elle n'existe que dans l'esprit des juges de la chambre criminelle. L'infraction est putative, car l'auteur des coups ne peut donner la mort à un cadavre. L'on peut penser qu’on punit un comportement qui n'est pas une infraction et en ce sens la décision ne paraît pas très respectueuse de la loi.

L'arrêt du 16 janvier 1986 permet à la chambre criminelle de faire une assimilation entre une infraction impossible et une tentative d'homicide volontaire, mais aussi de manière plus implicite une distinction entre le meurtre ou homicide volontaire et les atteintes à l'intégrité physique.

II. La distinction entre la tentative de meurtre et les atteintes à l'intégrité du cadavre

L'arrêt donne de manière implicite le critère de distinction entre la tentative de meurtre ou l'homicide volontaire et les atteintes à l'intégrité du cadavre (A), ce qui montre une volonté de punir fermement l'auteur des faits (B).

A. Le critère de la distinction entre la tentative de meurtre et les atteintes à l'intégrité du cadavre
Dans l'attendu qu'à supposer, on comprend que la distinction entre une tentative de meurtre et les atteintes à l'intégrité du cadavre, c'est le fait de savoir ou de ne pas savoir que la victime est morte. En effet, s’il croit que la personne de la victime est vivante, l'auteur de violence qui avait l'animus necandi, c'est-à-dire l'intention de donner la mort, est l'auteur d'une tentative de meurtre ou d'homicide volontaire qui n'a pu être consommée en la circonstance indépendante de sa volonté que la personne est morte. Le fait de vouloir donner la mort à autrui est un crime réprimé par l'article 221-1 du Code pénal. Comme tous les crimes, sa tentative demeure punissable. Le crime est la catégorie d'infraction la plus grave pour laquelle l'emprisonnement est prévu. L'article 221-1 du Code pénal nous informe que la peine encourue est de 30 ans de réclusion criminelle. C'était le cas dans l'espèce, l'individu qui a exercé les violences volontaires sur le cadavre était animé de l'animus necandi, il n'a pas pu lui donner la mort, car la victime était déjà morte en l'espèce.

Si maintenant, l'auteur des violences volontaires sur le cadavre sait que la victime est morte, il ne commet pas une tentative de meurtre, mais un délit ; l'atteinte à l'intégrité du cadavre qui est réprimé à l'article 225-17 du Code pénal, qui, dans son alinéa 1er dispose « Toute atteinte à l'intégrité du cadavre, par quelque moyen que ce soit, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amendes ». Il convient de remarquer que ce n'est plus un crime, mais un délit, c'est-à-dire une infraction moins grave donc la peine encourue et moins importante que pour un crime. L'arrêt le dit implicitement en expliquant que c'est parce que l'auteur des violences était persuadé que la victime était vivante qu’il avait commis une tentative de meurtre, on exclut l'application ainsi de l'article 225-17 du Code pénal, mais sans en dire un mot. Mais derrière le caractère implicite, il y a une intention de punir fermement l'auteur des faits.

B. Une volonté de punir fermement l'auteur des violences volontaires
La chambre criminelle a voulu punir fermement l'auteur des violences volontaires, car elle a choisi pour qualifier ces faits, une qualification pénale ou la peine encourue même si elle n'est pas la peine prononcée à des chances d'être supérieure à la peine prévue pour l'atteinte à l'intégrité du cadavre qui est d'un an et de 15 000 euros d'amendes, il faut le rappeler.

Il y a donc une volonté de punir fermement qui est critiquable en ce que le juge pénal doit appliquer le principe de proportionnalité, son désir de punir un comportement ne doit pas l'emporter sur la gravité de ce comportement. Sinon la peine risque d'être trop forte. De plus, l'article 111-4 du Code pénal dispose que « la loi est d'interprétation stricte ». Ce n'est pas le cas de cette solution qui n'interprète pas strictement la loi, mais procède à une assimilation pour arriver à des fins punitives.


Sources :

- Droit pénal spécial, Michèle Laure Rassat, Dalloz 8e édition
- Droit pénal spécial, Valérie Malabat, Dalloz 9e édition Hypercours
- Note sous Crim 16 janvier 1986, Observations Georges Levasseur, Revue Sciences criminelles 1986, page 839, Observations André Vitu Revue Sciences criminelles 1986, page 849