Parmi les procédés de raisonnement, le juriste fait appel le plus souvent au syllogisme fondé sur des classifications des règles et des notions, mais aussi permettant un raisonnement pointu lorsque ceci est nécessaire (le plus souvent en absence de règles de droit positif clair).

Or comment faire un syllogisme en droit ? Dans un premier temps quand les textes sont clairs ainsi que les faits, le syllogisme est simple (I), cependant ce syllogisme devient complexe lorsque des limites touchent la mineure et la majeure (II) et nous verrons quelle démarche adopter selon les différents cas présentés.

I- Le syllogisme

A-   Le syllogisme simple

En principe, le syllogisme est composé d'une majeure, d'une mineure et d'une conclusion.
La majeure est la règle de droit applicable en l'espèce. L'étudiant doit en premier lieu commencer à déterminer la règle applicable, et donc le bon fondement juridique au raisonnement. Il ne s'agit pas de faire un catalogue des règles de droit apprises en cours, mais de trouver la bonne règle de droit telle qu'interprétée aussi par les tribunaux. Des arrêts peuvent être inclus dans la majeure.
La mineure est le cas, et donc les faits que l'élève doit constater et classifier. Ainsi, dans la mineure, l'étudiant doit faire rentrer les faits dans une catégorie juridique déterminée, et donc les qualifier.
La conclusion n'est autre que la solution de l'espèce et donc comment a été appliqué la règle de droit aux faits.
Donc devant un cas le juge/ l'étudiant commence à déterminer la règle applicable à la majeure ensuite, il constate les faits et se demande si ces faits rentrent dans la catégorie de la règle. Il en déduit une solution.

B-   Le syllogisme judiciaire complexe

Les limites de la mineure :

les éléments constitutifs de qualification peuvent être trouvés dans la règle de droit permettant ainsi la qualification des actes. Cependant, les éléments de qualification peuvent être trouvés dans des jurisprudences (surtout en droit administratif par exemple). Toutefois, qualifier est un acte qui requiert le plus souvent plusieurs syllogismes successifs.

Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Cette liberté de choix se complique encore plus et s'élargit en raison de l'imprécision des concepts juridiques à partir desquels s'opère la qualification :
- Des fois, certains contrats ont une nature propre : sui generis.
- Les individus peuvent maquiller une situation juridique.
- Des fois, le juge raisonne selon l'équité pour protéger la partie la plus faible.
Ainsi, l'étudiant doit parfaire son raisonnement, et cela, en justifiant toute qualification selon un syllogisme.

Les limites de la majeure :

le syllogisme suppose que le raisonnement juridique trouve un appui solide sur une règle de droit claire. Dans certains litiges, des complications se posent dans le fait de l'imperfection de la règle.
Quand elle est obscure et absente, il doit alors l'interpréter et ainsi, déduire un principe ou des conséquences afin de justifier tel choix. Et donc l'élève face à ces complications devra étoffer et présenter son interprétation.
Finalement, certaines règles peuvent avoir un contenu variable, c'est-à-dire elles contiennent des notions que l'on peut importer dans un sens ou un autre. 
Dans ces cas, le syllogisme judiciaire simple ne tient plus. L'ambiguïté de ces cas oblige le juge et donc l'élève à faire des choix et c'est là où le raisonnement juridique, la dialectique entre en jeu. Il faut donc discuter les solutions, juger leurs mérites et si possible trancher entre elles.


II- Exemple


Prenons la situation de droit suivante :

Deux amateurs d'articles se rendent dans une galerie d'art et décident d'acheter une sculpture. Ils rencontrent le peintre et celui-ci accepte de leur vendre la sculpture. Le contrat de vente est ainsi conclu entre eux. Néanmoins, le peintre s'excuse de ne pouvoir déterminer le prix de son oeuvre lors de la conclusion du contrat. Peu de temps après, le peintre facture les époux d'une somme aberrante. Ils refusent de la payer en invoquant la nullité du contrat de vente.
Le peintre vient vous consulter pour savoir s'il est en droit de réclamer le paiement ou non.

La mineure :

En l'espèce, il est affirmé que le contrat est un contrat de vente conclu entre les époux et le peintre pour l'achat d'une sculpture. Néanmoins, le prix n'a pas été indiqué lors de la conclusion du contrat.
D'où la question en termes concrets suivante : les époux peuvent-ils invoquer la nullité du contrat ?
En termes abstraits : l'absence de détermination du prix au moment de la conclusion du contrat de vente mène-t-elle à sa nullité ?

La majeure :

Puisqu'on est dans la vente, selon la qualification faite en l'espèce, nous raisonnerons selon ce régime.
Le principe est dans la vente que le prix doit être déterminé lors de la conclusion du contrat et cette fixation est l'affaire des parties au contrat. Il n'est donc pas question de s'en remettre au juge ou à une fixation judiciaire du prix de la vente, c'est-à-dire à l'évaluation judiciaire de la chose qui fait pendant au prix. Cette exigence de détermination du prix trouvé dans les textes de vente a été érigée en principe par l'
article 1591 ancien, devenu 1163 nouveau. À défaut de fixation de prix lors de la conclusion du contrat, le contrat est frappé de nullité, sauf si le prix est rendu déterminable par les parties, et cela, par un procédé qui ne dépend pas de la volonté des parties.

Solution :

En l'espèce, le prix n'a pas été convenu par les parties, de plus, aucune modalité pour fixer le prix n'a été prévue. Suivant l'article 1591 devenue 1163, si le prix n'est pas fixé par les parties, le contrat de vente est nul. Donc, en l'espèce, le contrat est nul et les époux ne sont pas tenus de payer le prix.


Autres exemples de cas pratiques


Source : Objectif droit méthodo, Frédéric-Jérôme Pansier, édition LexisNexis