Énoncé

Depuis trois semaines, un boulanger commerçant et artisan, et son fournisseur local en farine sont en désaccord. Le boulanger estime que le prix pour le kilo de farine est beaucoup trop élevé et que son fournisseur cherche à profiter de lui. Mais pour faire tourner son commerce, il continue à utiliser la farine qu'il reçoit, mais refuse de la payer jusqu'à ce que son fournisseur devienne « raisonnable ».

Son fournisseur est excédé. Il pratique simplement les prix du marché. Après avoir plusieurs fois réclamé le paiement de sa créance au boulanger au cours des deux dernières semaines pour la dernière livraison, il n'a toujours pas obtenu de résultats. Il envisage d'arrêter le contrat qui les lie avant la prochaine livraison dans deux semaines, mais il souhaiterait d'abord avoir l'occasion de récupérer ce qui lui est dû.

N'ayant jamais eu de problèmes de ce genre en dix ans de métier, il est un peu perdu. Il s'est renseigné sur internet et a trouvé qu'il pouvait demander une injonction de payer, mais aussi faire un référé. La créance n'est pas discutable au fond, le boulanger fait seulement preuve de mauvaise foi, lui-même a un créancier sur le dos. Bien que patient avec lui, il préfère garder de bonnes relations commerciales avec lui, mais pour cela il doit le payer rapidement.

Il vous demande ce qu'il est préférable de faire pour récupérer le plus efficacement son argent, sans que le boulanger ne puisse refuser de payer.


Corrigé

En l'espèce, un commerçant refuse de payer son fournisseur par mauvaise foi, alors que celui-ci a rempli son obligation contractuelle. Le créancier souhaite être payé rapidement sans que le débiteur ne puisse s'y opposer.

Dans le cadre d'un recouvrement de créance, est-il mieux d'intenter une action en injonction de payer plutôt qu'une demande en référé pour ne pas se voir opposer le refus de payer du débiteur et obtenir l'exécution rapidement ?

Les règles de procédure commerciale régissant l'injonction de payer et le référé se trouvent dans le Code de procédure civile : 1405 à 1424 pour la procédure d'injonction et 872 et suivant pour la procédure de référé.


I. L'injonction de payer

En ce qui concerne l'injonction de payer, la loi dispose que la créance doit avoir une origine « contractuelle » et doit avoir un montant déterminé (1405 CPC). Le créancier pourra alors faire une demande en injonction de payer au président du tribunal de commerce, compétent pour les litiges entre commerçants. Il déposera une requête précisant le montant de sa créance et de documents justificatifs. Le président pourra alors rendre une ordonnance en injonction de payer à l'encontre du débiteur.

Celui-ci a le choix entre payer directement ou s'opposer à cette ordonnance. Ce n'est qu'en l'absence d'opposition que le créancier pourra demander que l'ordonnance devienne exécutoire et après la signification à personne dans un délai de 6 mois.

Cependant, le débiteur peut toujours s'opposer à l'ordonnance dans un délai d'un mois après la signification de l'ordonnance. Il y aura alors un litige au fond et contradictoire.


II. La procédure de référé

En ce qui concerne la requête en référé, elle est adressée au président du tribunal de commerce. Étant une procédure d'urgence, pour que la requête soit recevable, il ne doit y avoir « aucune contestation sérieuse » sur la créance en principe (872 CPC). Autrement s'il existe une telle contestation, il sera possible de se fonder sur un « trouble manifestement illicite » ou pour « prévenir d'un dommage imminent » (873 CPC).

L'affaire sera alors traitée dans un court délai en raison de l'urgence et notamment en absence de toute contestation sérieuse. L'ordonnance sera directement exécutoire de plein droit, mais à titre provisoire.

Le débiteur défenseur pourra toujours opposer des arguments précis pour contester sérieusement l'existence de la créance ou de son montant. Alors le président du tribunal pourra en tenir compte pour rejeter la requête en référé.

Si l'action est recevable, l'ordonnance n'est que provisoire. Le créancier demandeur devra tout de même intenter une action au fond pour voir reconnaître le bien-fondé de sa demande en présence de contestation que le juge des référés ne peut pas trancher, même s'il en aura déjà obtenu l'exécution.

En l'espèce, il semble préférable pour le fournisseur d'intenter une action en référé, selon les faits présentés : la pratique des prix du marché à un montant déterminé, le fondement contractuel de la créance, la propre exécution de son obligation. Il répond aux conditions des deux actions.

En préférant l'action en référé, il ne pourra pas connaître l'opposition du débiteur de mauvaise foi, ni attendre cette possible opposition dans un délai d'un mois, pour voir l'affaire tranchée au fond en sa faveur visiblement.

Pour ce qui est du référé, le fournisseur créancier répond aux conditions d'absence de contestation sérieuse possible en raison de l'existence contractuelle de la créance et de son montant justifié. Le débiteur ne semble pas pouvoir opposer de contestation sérieuse. De plus, en ce qui concerne la condition d'urgence, le fournisseur a lui-même ses propres créanciers à payer.

À terme, il pourra obtenir une ordonnance directement exécutoire, même si l'affaire devra être tranchée au fond en raison du caractère provisoire du référé.



En conclusion, pour être payé plus rapidement et sans se voir opposer le possible refus du débiteur en raison de l'absence de contestation sérieuse possible à l'encontre de sa créance : il est plus opportun pour le créancier fournisseur d'agir en référé auprès du président du tribunal de commerce.


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