Enoncé du cas pratique

15 octobre 2015. Louise se rend dans la boutique de Laurent spécialisé dans la vente de meubles du style années 1950-1960 et quelques peintures. C'est alors que l'oeil de Louise est attiré par une petite peinture posée dans un coin de la boutique. C'est cette oeuvre qu'elle veut !

Elle demande donc quelques informations au vendeur au sujet de son auteur. « C'est une superbe oeuvre américaine des années 1930 de xxx, très connu à cette époque, d'ailleurs ! » déclare le vendeur.

Toutefois, Louise fière d'exposer cette oeuvre dans son salon s'aperçoit après une conversation avec sa voisine Marie-Cornélie, passionnée d'art, qu'il ne s'agit que d'une copie, de piteuse qualité qui plus est. Elle lui conseille de demander la nullité de la convention...

Louise souhaite annuler le contrat sur le fondement du dol.

Qu'en pensez-vous ?

Attention à la date à laquelle le cas pratique a lieu déterminant en effet le droit applicable.


Correction du cas pratique

Dans quelle mesure est-il possible d'annuler un contrat sur le fondement du dol ?

Selon les dispositions de l'article 1116 ancien du Code civil, le dol est une erreur provoquée par l'une des parties au contrat dans le but d'emporter le consentement de l'autre partie. Il est donc nécessaire qu'il y ait l'addition d'une erreur et que celle-ci soit provoquée. D'ailleurs, d'après une jurisprudence de la troisième chambre de la Cour de cassation, 15 décembre 1998, l'erreur qui est induite par des manoeuvres dolosives est considérée comme vice du consentement dès lors qu'elle détermine l'autre partie à conclure.

Pour annuler un contrat sur le fondement du dol, il est nécessaire que ses éléments constitutifs soient effectivement remplis, rencontrés.

Quels sont les éléments constitutifs du dol ?

L'erreur doit avoir été délibérément provoquée. Cela suppose l'addition de deux éléments : un élément matériel (A) et un élément intentionnel (B). En outre, il sera nécessaire de s'intéresser aux caractères du dol (C).


A. L'élément matériel

Le dol suppose une erreur de la part de la victime qui est en outre le résultat d'une ou d'un ensemble de manoeuvres de la part de l'autre partie. La victime est donc volontairement induite en erreur par des manoeuvres au sens de l'article 1116 ancien tel que des machinations, ou encore des mises en scène. Dans le cas de l'espèce, l'erreur provoquée n'est pas provoquée par de telles manoeuvres.

Il peut en outre s'agir de mensonges. D'après un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 6 novembre 1970, le simple mensonge suffit à caractériser cet élément matériel bien qu'il soit nécessaire de différencier le bonus dolus du malus dolus, en ce que le premier est souvent utilisé dans les relations commerciales pour lesquelles des exagérations peuvent être admises en effet lorsque le vendeur de la chose cherche à parvenir à la vente de l'objet.

Dans le cas de l'espèce, Laurent a menti à Louise en présentant la peinture comme étant celle d'un artiste américain connu dans les années 1930 alors qu'il n'en est rien.

Le vendeur a donc clairement menti à l'acheteuse. Il y a donc eu manoeuvre de la part du vendeur en ce que celui-ci a menti à l'acheteuse dans le but de vendre la chose, objet du contrat de vente.

Or pour que cette manoeuvre soit qualifiée de dolosive, il est nécessaire d'apporter la preuve que son auteur a eu pour objectif d'inciter la victime à contracter : il faut donc apporter la preuve de l'élément intentionnel.


B. L'élément intentionnel du dol

L'élément intentionnel réside dans l'intention par l'une des parties de tromper l'autre cocontractant. Toutefois, le dol ne sera constitué que si la volonté de tromper est effectivement apportée. La négligence de la part de l'autre contractant n'emportera pas la qualification juridique du dol.

Dans le cas de l'espèce, le dol suppose que le vendeur connaisse effectivement ce défaut d'authenticité de la peinture or, aucun élément ne permet d'apporter la preuve de cet élément intentionnel d'autant que celui-ci est spécialisé dans la vente de meubles d'un style particulier.


C. Les caractères du dol

Le dol doit émaner du cocontractant (1) et être déterminant du consentement (2).


1. Le dol doit émaner du cocontractant

L'article 1116 ancien fait expressément référence aux manoeuvres pratiquées par l'autre partie. Le principe veut que le dol soit cause de nullité de la convention projetée si celui-ci émane effectivement de la partie envers laquelle l'obligation est contractée. Dans le cas de l'espèce, le dol émane du vendeur.


2. Le dol déterminant du consentement

L'article 1116 ancien prévoit que sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. L'appréciation de ce caractère déterminant du consentement s'effectue in concreto. Cela emporte pour conséquence que des éléments propres à la personne qui invoque le dol seront pris en compte (âge, profession, etc.).

Dans le cas d'espèce, pour le cas où le vendeur aurait dit la vérité, nul doute que l'acheteuse n'aurait pas contracté.

L'acheteuse serait donc en mesure de demander la nullité du contrat sur le fondement du dol. Toutefois, rien ne permet de constater que le vendeur ignorait le défaut d'authenticité de l'oeuvre.


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