Énoncé du cas pratique
Jules est salarié de la société Herculéo spécialisée dans la destruction d'immeubles. Jules s'est violemment blessé un vendredi soir alors que la journée touchait à sa fin. Le bilan est triste pour le salarié : deux côtes cassées et le bassin fracturé.
Au cours de la procédure, l'information suivante vous est communiquée : une cour d'appel a déclaré la société Herculéo coupable de délit de blessures involontaires, avec une interruption temporaire de travail supérieure à trois mois.
D'ailleurs, il avait également été fait mention d'un manque d'organisation de formation pratique et appropriée en matière de sécurité dans l'arrêt d'appel, dans la mesure où des employés n'ont pas reçu ladite formation, d'autres ayant changé de poste n'en ont plus bénéficié. De même, des informations n'ont pas été données.
Vous vous intéressez à l'arrêt de la cour d'appel. Des rappels sont effectués et vous y êtes attentifs. Parmi eux, les dispositions de l'article 222-19 du Code pénal (délit de blessures involontaires) ainsi que celles de l'article 121-3 du même Code (maladresse, imprudence, négligence, manquement à une obligation légale ou réglementaire de prudence ou de sécurité pour les cas dans lesquels l'auteur de l'infraction n'aurait pas accompli les diligences normales au regard de ses missions, fonctions, compétences ou pouvoirs et moyens mis à sa disposition).
En outre, il est rappelé que la personne morale peut être déclarée responsable de ce délit lorsqu'il est commis par ses organes ou représentants, agissant pour son compte, en vertu des dispositions contenues aux articles 121-2, 221-7, 222-19 et 222-21 du Code pénal.
La cour d'appel a retenu que c'est la société qui a créé cette situation qui a permis la réalisation dudit dommage. Des mesures auraient pu être prises pour éviter justement la réalisation de ce dommage, et par conséquent, la responsabilité pénale de la personne morale est engagée. Elle a en effet retenu qu'il y avait eu une délégation de pouvoirs en matière de sécurité au bénéfice de Luc C. qui les a subdélégués au bénéfice d'André B., lui-même tuteur de Jules. La société Herculéo décide alors de former un pourvoi en cassation. Pour elle, cette délégation de pouvoirs qui a été retenue par les juges ne permet pas de conclure que celui-ci fût effectivement un organe ou un représentant de ladite société.
Vous êtes juge de cassation, vous vous intéressez à la notion d'organes ou de représentants agissant pour le compte de la personne morale
Correction du cas pratique
Dans quelle mesure est-il possible d'engager la responsabilité pénale de la personne morale ?
En vertu des dispositions des articles L.4141-1 et suivants et R.4141-2 et suivants du Code du travail, les chefs d'établissement sont tenus de prévoir l'organisation d'une formation pratique et appropriée en matière de sécurité pour les travailleurs embauchés ou changeant de poste ou de technique.
Dans le cas d'espèce, il est relevé que certains salariés n'ont pas reçu cette formation ; d'autres ayant changé de poste n'en ont pas bénéficié, et, des informations n'ont pas été données.
Donc, la responsabilité pénale du chef d'établissement peut être engagée.
Or, la cour d'appel a décidé de retenir que la responsabilité pénale de la personne morale est engagée en ce qu'elle a créé ladite situation ou du moins n'a pris les mesures qui auraient permis de l'éviter en effet.
La Cour d'appel a retenu qu'il y avait eu une délégation de pouvoirs en matière de sécurité.
La Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 25 mars 2014 a retenu qu'un tuteur, qui en outre s'était vu subdéléguer des pouvoirs en matière de sécurité, « disposait (...) des moyens nécessaires pour assurer sa mission » au regard de sa compétence, de son autorité et de son niveau hiérarchique.
Dans le cas d'espèce, André B. est le tuteur de la victime et s'est vu subdéléguer des pouvoirs en la matière.
Donc, le manquement a été commis par un représentant de la personne morale, agissant pour son compte.
Sources : Légifrance, Village justice
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