Par conséquent, la juridiction du tribunal de commerce concerne uniquement des activités commerciales ou les litiges entre personnes physiques ou morales exerçant une activité de nature commerciale.

Le tribunal de commerce semble donc être un tribunal conçu par des commerçants, pour des commerçants qui sont supposés connaître le droit qui leur est applicable.

Il faut tout de même préciser que, dans le présent article, seule la compétence matérielle des tribunaux de commerce est traitée, en effet la compétence territoriale des tribunaux de commerce ressort quant à elle du droit commun en la matière c'est-à-dire des articles 42 à 48 du Code de procédure civile.

Un article traitant uniquement de la compétence matérielle du tribunal de commerce

La compétence matérielle renvoie à la question de savoir pour quelles matières, pour quel type de litige le tribunal de commerce est compétent. Il faut distinguer la compétence telle qu'elle est prévue par la loi des hypothèses où ce sont les parties qui cherchent à préciser quels sont les litiges qui relèveront des tribunaux de commerce.

La compétence légale

Le tribunal de commerce est une juridiction d'exception ce qui veut dire qu'il n'est compétent que si un texte particulier lui a expressément donné compétence pour un type de litige particulier. Le tribunal de commerce doit donc soulever d'office son incompétence, c'est-à-dire qu'il doit lui-même se déclarer incompétent. En outre, il statue en premier et dernier ressort pour les litiges inférieurs à 4 000 ?.

Ici, la compétence légale des tribunaux de commerce est expressément fixée à l'article L 721-3 du Code de commerce qui expose, comme nous l'avons vu ci-dessus, les types de litige pour lesquels les tribunaux de commerce sont compétents.

Avant de s'attarder plus en détail sur les trois types de compétence qui forment le coeur même de ce texte, il convient de faire un bref rappel historique de l'évolution de ce texte.

- Rappel historique :

C'était l'article 631 de l'ancien Code de commerce qui énumérait les litiges pour lesquels les tribunaux de commerce étaient compétents. Mais une loi du 17 décembre 1991 a, par mégarde, abrogé ce texte. Cependant, en 2000, lorsqu'a été codifié le Code de commerce, l'on ne s'en est pas rendu compte. L'on ne s'en est rendu compte qu'ensuite et l'on a donc voulu réparer l'erreur en introduisant, grâce à la loi NRE du 15 mai 2001, un texte qui, de nouveau, prévoyait la compétence des tribunaux de commerce à l'article L 411-4 du Code de l'organisation judiciaire.

Le problème était le suivant : entre 1991 et 2001, les tribunaux de commerce avaient statué alors qu'il n'y avait pas de textes qui prévoyaient leur compétence. Or, et comme nous l'avons vu, il s'agit d'une juridiction d'exception, et, donc elle n'a le droit d'être saisie que s'il y a un texte qui prévoit expressément sa compétence. Par conséquent, tous les jugements rendus pendant ces 10 ans étaient nuls. Le législateur a cependant utilisé la rétroactivité pour réparer cela.

Enfin, en 2006 le législateur a fait revenir cette disposition dans son code d'origine, à savoir dans le Code de commerce à l'article L 721-3.

- Les trois types de compétences figurant dans ce texte :

i) Les contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement :

Ainsi, dès lors qu'il y a un litige entre deux commerçants, ce litige relève de la compétence des tribunaux de commerce.

Mais que se passe-t-il quand il y a un litige entre un commerçant et un non-commerçant ? Dans l'hypothèse d'un litige entre un commerçant et un non-commerçant la jurisprudence énonce la règle suivante : si c'est le non-commerçant qui est le demandeur alors il a le choix. Il peut assigner le commerçant (le défendeur) soit devant les juridictions civiles soit devant les juridictions commerciales. En revanche, si c'est le commerçant qui agit contre le non-commerçant : dans ce cas, le commerçant doit assigner devant les juridictions civiles.

ii) Concernant les litiges relatifs aux sociétés commerciales

Cela recoupe plusieurs types de contestations, il y a trois sous-catégories :


. Les contestations relatives aux cessions de droits sociaux. Ces litiges-là relèvent de la compétence des tribunaux de commerce. Cette solution résulte de deux évolutions :

. Tout d'abord, le texte lui-même a été modifié. En effet, le texte visait les litiges entre associés à raison des sociétés commerciales. La jurisprudence en avait déduit qu'une cession à un tiers (quelqu'un qui n'était pas associé) ne relevait pas de cette hypothèse et donc de la compétence des tribunaux de commerce. Ce n'était que s'il y avait cession de contrôle (c'est-à-dire de la majorité des titres d'une société) que les tribunaux de commerce étaient compétents. Les cessions de contrôle étant des actes de commerce par accessoire objectif et donc relevaient de la compétence des tribunaux de commerce. En effet, les tribunaux de commerce sont compétents pour les actes de commerce entre toute personne or, la cession de contrôle étant un acte de commerce, les tribunaux de commerce pouvaient être compétents.

. Enfin aujourd'hui, toutes les cessions de droits sociaux relèvent de la compétence des tribunaux de commerce qu'elles emportent ou pas transfert du contrôle de la société (nouvelle évolution résultant d'un arrêt de la Cour de cassation du 10 juillet 2007 prenant appui sur la nouvelle rédaction du texte).

. Toutes les demandes dirigées contre une société commerciale relèvent de la compétence des tribunaux de commerce. Par exemple, un associé qui se plaindrait de ne pas avoir reçu les dividendes auxquels il a droit assignera la société devant les tribunaux de commerce.

. Tout ce qui est relatif à des faits et actes se rattachant directement à la gestion des sociétés commerciales. Par exemple, une action en responsabilité exercée à l'encontre d'un dirigeant d'une société commerciale relèvera de la compétence des tribunaux de commerce.

Ainsi, nous constatons donc la conception très large qui ressort de cet article, cela étant dans l'objectif d'assurer une certaine unité dans le contentieux qui peut naître à l'occasion de l'exploitation d'une société commerciale puisque l'on souhaite que ce soit les tribunaux de commerce qui soient compétents de manière générale.

iii) Concernant les contestations relatives aux actes de commerce entre toute personne :

La qualification d'actes de commerce entre toutes personnes désigne les actes de commerce quelle que soit la qualité des parties.

Les clauses attributives de compétence matérielle

Il n'y a pas de texte qui réglemente ces clauses, c'est-à-dire les clauses qui prévoiraient quel sera le tribunal compétent en cas de litige entre les parties au contrat. En effet, la loi ne précise pas le régime applicable à ces clauses contractuelles, mais c'est la jurisprudence qui a déterminé le régime de ces clauses, les conditions de validité de ces clauses.

Ainsi, il ressort de la jurisprudence que la clause est valable si elle écarte la compétence des tribunaux de commerce au profit de celle des juridictions civiles.

Néanmoins, la clause écartant la compétence des juridictions civiles au profit de celle des tribunaux de commerce est plus fréquente en pratique. Cependant, l'application de ces clauses va dépendre du cas dans lequel on se trouve. Il faut distinguer deux situations :

- Si la demande émane du non-commerçant : le non-commerçant a une option et par conséquent il peut choisir où assigner. Quel est l'effet de la clause dans ce cas ? La clause supprime l'option en imposant la compétence des tribunaux de commerce. La jurisprudence, dans ce cas, considère qu'on va pouvoir appliquer cette clause, mais uniquement si c'est le non-commerçant qui assigne en justice.

- Si c'est le commerçant qui est le demandeur : dans ce cas, c'est le commerçant qui assigne le non-commerçant. Le principe, dans une telle hypothèse, c'est que le commerçant ne peut assigner le non-commerçant que devant les juridictions civiles et donc l'effet de la clause reviendrait à remplacer la compétence des juridictions civiles par celles des juridictions commerciales. Ce serait opérer une substitution et la jurisprudence n'admet pas cela et c'est pourquoi, dans cette hypothèse, la jurisprudence paralyse la clause.

Source : Legifrance


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