Nous allons revenir, dans cet article, sur quelques arrêts importants rendus en matière sociale par la Chambre sociale de la Cour de cassation, courant décembre 2022.
En matière de rupture du contrat
Cass. Soc., n° 21-16.000.
Les juges ont retenu que le fait de supprimer et de transférer des messages électroniques professionnels ne constitue pas une faute grave qui rendrait impossible le maintien du contrat de travail entre une association et son directeur, étant donné que : 1) l’association n’avait pas procédé à la rédaction d’une charge informatique qui aurait eu pour objet de réglementer non seulement le fonctionnement mais aussi l’usage des différents outils informatiques effectivement mis à la disposition de tous les salariés à l’occasion de leur travail ; 2) de même, l’association n’alléguait aucun préjudice, celle-ci ayant été par ailleurs en mesure de récupérer ces messages électroniques adressés de manière directe au salarié sur sa boîte professionnelle personnelle, et avait finalement été en mesure de restaurer l’ensemble des messages supprimés.
Cass. Soc., n° 21-15.032.
En l’espèce, les juges de la Cour de cassation ont rappelé la définition de la faute grave, à savoir : que cette faute est telle qu’elle ne peut permettre le maintien effectif du salarié au sein de l’entreprise. Ils ont jugé que lorsqu’un employeur laisse s’écouler un délai entre l’engagement de la procédure de licenciement pour faute et la connaissance des faits en cause, cette circonstance ne peut valablement retirer ce caractère de gravité à la faute effectivement commise, dès l’instant où le salarié était absent de l’entreprise, et dont le contrat de travail avait été suspendu pour maladie.
Cass. Soc., n° 21-19.280.
La Chambre sociale de la Cour de cassation a confirmé l’arrêt rendu par une cour d’appel qui avait jugé qu’une volonté réitérée d’insubordination et de désorganisation permanente du service était effectivement constitutive d’une faute grave. Le salarié concerné par le licenciement pour faute avait tenu des propos ironiques de manière répétée. Ceux-ci, ont retenu les juges, sont non seulement révélateurs d’une insubordination à l’encontre de sa hiérarchie mais sont en outre constitutifs d’un abus de sa liberté d’expression.
En matière d’exécution du contrat
Cass. Soc., n°21-18.114.
En l’espèce, les juges de la Chambre sociale ont confirmé l’arrêt rendu par une cour d’appel qui a considéré qu’un employeur n’avait pas manqué à son obligation de sécurité concernant la situation d’une salariée qui avait communiqué à la directrice du magasin dans lequel elle était employée des agissements de sa supérieure hiérarchique. Plus précisément, la salariée avait fait part des agissements de harcèlement dont elle faisait l’objet à la directrice du magasin qui a, le même jour, décidé de la tenue d’une réunion au côté d’un représentant du personnel afin que les faits dénoncés soient discutés. Elle en avait profité pour proposer à la salariée concernée de changer de secteur. En outre, il ressort des faits de l’espèce que le responsable des ressources humaines avait pu s’entretenir avec la salariée et qu’une enquête avait rapidement été diligentée.
Cass. Soc., 21-18.992
Ici, la Chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé que le transfert des contrats de travail (avenant du 28 janvier 2011 à l’accord en date du 5 mars 2002 au regard de la reprise du personnel dans le secteur de la prévention et de la sécurité) ne saurait s’opérer de plein droit et que ce transfert implique l’accord exprès des salariés lorsque les conditions d’application inscrites au sein des dispositions de l’article L. 1224-1 du Code du travail ne sont pas réunies. Le raisonnement juridique tenu par la cour d’appel a été validé par la Cour de cassation dans la mesure où celle-ci avait retenu, tout d’abord, que le salarié concerné avait fait part de son refus de transfert de son contrat de travail à la société entrante, par une lettre adressée en date du 12 juin 2015, ensuite et alors même que le contrat de travail du salarié n’avait pas été valablement transféré du fait de son refus, la société avait décidé de rompre le contrat de travail sans respecter de procédure de licenciement préalable. D’où il s’ensuit que la société était en effet contrainte de verser des indemnités de rupture ainsi que des dommages et intérêts dans la mesure où le licenciement prononcé était sans cause réelle et sérieuse.
En matière de sécurité et d’hygiène
Cass. Soc., n° 21-23.662.
Dans cette décision, les juges de la Cour de cassation ont rappelé que l’avis qui est émis par le médecin du travail peut tout à fait faire l’objet d’une contestation devant le Conseil des prud’hommes qui sera en mesure de procéder à l’examen de tous les éléments qui ont amené au prononcé dudit avis ; le médecin du travail est l’unique acteur effectivement habilité à constater une inaptitude ; de même, cet avis peut fait l’objet d’une telle contestation aussi bien de la part du salarié que de son employeur. Si un recours n’est pas enclenché, par voie de conséquence l’avis du médecin du travail s’impose aussi bien au salarié qu’à son employeur. Ici, les juges de la Chambre sociale rappellent explicitement que dans la mesure où l’avis concerné, qui mentionnait explicitement les voies de recours ainsi que les délais qui y affèrent, n’a fait l’objet d’aucune contestation par chacune des parties, il leur était impossible d’en contester la régularité, aussi bien du point de vue des éléments médicaux qu’à l’égard de l’étude de poste.
Cass. Soc., n° 21-19.454.
Dans le cas d’espèce la Cour de cassation, en sa Chambre sociale, a considéré que le fait, pour un employeur, de mettre à disposition de ses salariés qui œuvrent dans le secteur de l’aide à domicile des masques FFP2 dès lors qu’ils se rendent au domicile d’un individu positif ou symptomatique à la Covid-19 est bien de nature à réduire l’exposition au virus. En décidant ainsi, les juges de la Chambre sociale ont confirmé le raisonnement tenu par la cour d’appel.
Références
Cass. Soc., n° 21-16.000
Cass. Soc., n°21-15.032
Cass. Soc., n° 21-19.280
Cass. Soc., n°21-18.114
Cass. Soc., 21-18.992
Cass. Soc., n° 21-19.454