Une large part de la jurisprudence administrative, et en particulier celle du Conseil d’Etat, s’attèle à préciser et à encadrer le statut des activités de l’administration, et la répartition des compétences entre les juridictions en fonction de critères spécifiques. A l’origine, un acte administratif est alors un acte émanant des pouvoirs publics ou d’un organe administratif y étant rattaché, par ses missions ou par ses pouvoirs notamment. Toutefois, l’arrêt Monpeurt rendu par le CE en 1942 présente un bouleversement à cette base jurisprudentielle en apportant une nouvelle définition de l’acte administratif, et un élargissement de ses sources.                                                                                                 

En effet, il est question en l’espèce de la création d’un organisme par les pouvoirs publics, à l’occasion de la Loi du 16 août 1940 qui vise à contrôler une pénurie en France, liée à l’industrie du charbon. Par cette loi, les pouvoirs publics abordent ainsi la création d’un établissement de droit privé, chargé d’assurer une mission de service public qui lui est conférée par le gouvernement. Ainsi, le pouvoir dont l’organisme est investi s’avère œuvrer dans le cadre de l’intérêt général, et la question de la qualification des actes émis par cet organisme se pose, ainsi que sa propre nature en tant qu’établissement créant du droit administratif. M. Monpeurt porte alors un recours en annulation contre une décision du comité d’organisation de l’industrie créé par cette loi, et l’affaire est portée jusqu’au Conseil d’Etat, qui rend sa décision en 1942.                                                                                        

Cet arrêt se situe alors dans la lignée d’une jurisprudence initiée par le Conseil d’Etat en 1938, par l’arrêt Caisse Primaire et protection, qui pose le principe selon lequel il est possible de conférer la gestion d’un service public à une personne privée. Suite à ce bouleversement de la notion de service public et de la frontière entre l’activité des personnes publiques ou privées, l’arrêt Monpeurt étend celui-ci en conférant non seulement la possibilité de gérer un service public à un organe privée, mais également à produire du droit rattachable à l’ordre administratif. En outre, il est question ici de trancher sur la compétence des juridictions dans l’espèce, et l’enjeu de la qualification de l’organisme ainsi que de la norme produite est alors central dans le cadre de la jurisprudence administrative.                    La question soulevée dans le cadre de cet arrêt est donc majeure, et se porte notamment sur la capacité d’un tel organisme privé, à produire des actes administratifs qui s’imposeraient aux administrés, et qui ressortiraient donc en cas de litige, de la compétence du juge administratif ou du Conseil d’Etat ? Cette problématique débouche alors sur la redéfinition des actes administratifs, et plus particulièrement, des établissements publics eux-mêmes.

Il convient alors d’aborder le cadre de l’activité publique, par les auteurs aptes à produire des normes de droit administratif, puis par le contrôle et le rattachement de ces actes, avant d’aborder la redéfinition de ce cadre élaborée par l’arrêt, à travers la notion d’établissement public, et l’intégration de certains organes privés dans l’activité publique


I.    L’encadrement de l’activité des pouvoirs publics


A.    Les auteurs des actes administratifs

- Traditionnellement, la définition des actes administratifs est réalisée par la Jurisprudence : critère principal est l’autorité des décisions sur les administrés donc notion de droit supérieur qui s’imposerait à tous, et qui aurait un impact sur l’ordonnancement juridique
- Apport de l’Arrêt Blanco ;  contrôle des Actes administratifs par le Conseil d’Etat peu importe leur source. La seule exigence est qu’il s’agisse d’un acte administratif et plus forcément d’un organe émanant du cadre administratif ( pouvoirs publics)
- Intérêt général, prérogatives publiques,… : critères  précisés et élargis par la jurisprudence notamment rattachés à la prise en charge d’un service public, pour qualifier le rattachement au domaine administratif, malgré des remises en cause ultérieures par les décisions du CE

B.    Le contrôle des actes administratifs

- Contrôle par le Juge Administratif et les autres organes de l’ordre juridique administratif tel que le CE pour les actes établis par les pouvoirs publics et les organismes sous leur impulsion
- Contrôle des actes juridiques en fonction de leur nature ; juridiction spéciale administrative est très particulière et historiquement rattachée par des critères spécifiques aux pouvoirs publics.
- Bouleversement par l’arrêt Monpeurt car apporte une redéfinition de la notion d’acte administratif ; la question du jugement des actes administratifs passés par des organismes privés convient de revenir sur cette définition pour les y inclure.
- Élargissement du contrôle des actes administratifs car ouverture progressive à un plus grand nombre d’actes qui intègrent cette qualification  

II.    Une redéfinition du cadre administratif traditionnel


A.    La définition de l’établissement public

- Selon le CE, l’établissement public, rattaché à l’ordre administratif est principalement défini par sa participation à des services publics ou à d’autres activités liées à celle du gouvernement, qui correspond donc à un droit distinct de celui des administrés
- Les établissements publics relèvent tous du domaine administratif en principe et les décisions qu’ils prennent sont donc  des décisions administratives soumises au juge administratif
- Les prérogatives de puissance publique permettent en général de qualifier un pouvoir plus large que celui des personnes privés classiques, et l’établissement public répond donc à ces caractères selon une définition élaborée au fil de la jurisprudence. L’établissement public est créé par la puissance publique est fonctionne sous son égide

B.    Le rôle des acteurs privés dans le cadre des services publics

- Intégration des organismes privés pour la production de normes de Droit Administratif, notamment dans le cadre des Services Publics, qui permettent de rattacher ces établissements privés au cadre public par leur activité et leurs responsabilités
- En l’espèce, question du statut juridique du comité institué par la loi de 1940 et de sa capacité à produire des normes juridiques de droit public administratif
- Ici, les organismes en question ont été créés par les pouvoirs publics. D’après le CE, ce fait ainsi que la mission de Service public qui est confié à cet organisme de droit privé permet de le rattacher à l’ordre administratif.