La loi actuellement en vigueur contre les squats
Avant de s’intéresser plus en profondeur à cette proposition de loi, il apparait intéressant de revenir sur les dispositions législatives actuellement en vigueur en la matière. Ainsi, conformément à ce qui est contenu au sein de l’article 226-4 du Code pénal, la loi réprime les violations de domicile, communément appelés les squats, dans le cas de l’introduction dans un logement « à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte. » Le fait pour le ou les individus de demeurer sur les lieux est puni uniquement pour le cas où celui-ci découle d’une introduction illicite. Notons par ailleurs une lacune de la loi : celle-ci ne procède à aucune définition du logement qui peut faire l’objet de cette violation de domicile. De ce fait, la jurisprudence a dû élaborer des règles en la matière : les biens non meublés ne peuvent entrer dans la catégorie de ces logements pouvant effectivement faire l’objet d’un délit de violation de domicile au sens de l’article susmentionné. Ceci étant dit, cela se comprend dans la mesure où le logement en question n’est pas habitable à l’instant où l’introduction dans les lieux est effectuée.
Pour que le propriétaire du logement squatté puisse obtenir leur évacuation, le propriétaire est amené à déposer plainte et procéder à la constatation de l’occupation illégale de son logement par un officier de police judiciaire. Ensuite, celui-ci se rapproche du préfet qui intervient afin de mettre en demeure le ou les occupants du bien concerné de quitter les lieux dans un délai qui ne peut être inférieur à 24 heures. Si ces derniers n’ont pas quitté le logement à l’échéance du délai déterminé, alors le préfet devra demander l’évacuation forcée du bien.
Des députés ont décidé de proposer de nouvelles règles. Quelles sont les apports de cette nouvelle proposition de loi ?
Les apports de la proposition de loi étudiée
Afin de pallier les difficultés rencontrées par nombre de propriétaires victimes de telles intrusions, des députés ont proposé d’améliorer l’ensemble des conditions qui permettent de caractériser le squat. Ils proposent ainsi de punir d’égale manière l’introduction illicite dans les lieux et le maintien dans ceux-ci. Cette règle serait mise en place afin de pallier le fait que certains cas d’introduction illicite, conformément aux dispositions précitées, n’ont pu être valablement constaté.
L’absence de définition exacte du domicile concerné serait également abandonnée puisqu’ils prévoient que peu importe la nature du domicile, qu’il soit meublé ou non, qu’il s’agisse d’une résidence principe ou secondaire, ces logements pourraient tous faire l’objet d’un squat.
Toutefois il faut noter que cette proposition de loi ne prévoit pas de modifier des règles concernant la procédure d’évacuation mentionnée ci-dessus.
Cette proposition de loi intéresse aussi les loyers impayés et les expulsions subséquentes.
Les apports de cette proposition de loi dans le cadre des loyers impayés
La proposition de loi en cause intervient également dans l’objectif de créer un nouveau délit à l’encontre des locataires qui occuperaient en effet un bien « sans droit ni titre » alors qu’une décision de justice leur ordonne pourtant de quitter les lieux.
Toutefois, il faut comprendre ici que pour que le délit soit caractérisé, la décision de justice en question doit tout d’abord être définitive mais aussi exécutoire, et il sera nécessaire qu’un commissaire de justice commande au locataire visé de quitter les lieux. Ce ne serait qu’à l’issue de cette procédure, si toutes les conditions sont rencontrées et bien sûr si le locataire demeure sur les lieux, que le propriétaire du bien sera en mesure de déposer plainte à son encontre. Une peine de 6 mois d’emprisonnement serait par ailleurs encourue. L’instauration de cette crainte de se voir infliger une peine d’emprisonnement se comprend à l’aune de l’objectif principal poursuivi, à savoir : que le locataire quitte les lieux. Ces nouvelles dispositions seraient insérées dans l’article 315-1 du Code pénal.
Quid de la clause résolutoire dans le contrat de location ?
Tout d’abord, il est utile de retenir l’importance d’une clause résolutoire insérée dans un contrat de location. Celle-ci est d’importance majeure pour tout bailleur : en effet, elle lui permet de faire constater, pour le cas de loyers impayés, la résiliation du bail après la délivrance d’un commandement de payer qui est resté infructueux et ce, dans un délai déterminé de deux mois.
La proposition de loi concernée prévoit que cette clause devienne obligatoire. Elle serait, autrement dit, obligatoirement insérée dans tous les contrats de location. Il ne s’agit cependant pas d’une véritable révolution en la matière dans la mesure où l’immense majorité de ces contrats contiennent, à ce jour, une telle clause. Il s’agirait plutôt de protéger les bailleurs n’ayant pas inséré une telle clause dans leur contrat.
Concernant cette clause résolutoire, aujourd’hui, nombre de juridictions décident d’en suspendre les effets pour que les locataires concernés se voient attribuer un délai supplémentaire pour s’acquitter de leurs obligations contractuelles. Ces décisions, si elles étaient respectées par ces locataires, leur permettaient de ne pas être utilement expulsés du logement. Néanmoins, cette proposition de loi prévoit que supprimer tout simplement cette possibilité allouée aux juridictions même si ces dernières pourraient toujours décider d’accorder certains délais au profit des locataires indélicats. Or ce qui constitue une avancée majeure pour les propriétaires réside dans le fait que ces délais octroyés ne pourront pas empêcher l’expulsion de ces locataires.
Ce qui, in fine, pourrait être retenu de cette proposition de loi se situe aussi dans la réduction de certains délais de procédure. Toutefois, sans entrer dans le détail et bien que l’objectif de réduction des délais de procédure soit louable, la réalité des juridictions nationales aujourd’hui est bien différente de la théorie législative. Réduire les délais sur le papier est une chose, les rendre concrets en est une autre, notamment du fait de l’engorgement chronique des tribunaux français.
Références
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b0360_proposition-loi
https://www.bjavocat.com/2022/12/21/proposition-de-loi-kasbarian-impayes-squats-et-expulsions/
https://lcp.fr/actualites/la-loi-anti-squat-adoptee-par-l-assemblee-nationale-155429
https://www.vie-publique.fr/loi/287344-proposition-loi-anti-squat-occupation-illicite-des-logements-expulsion