L’abandon de poste : de quoi parle-t-on ?
Comment se caractérise un abandon de poste en droit du travail ? Celui-ci consiste en vérité en une absence injustifiée de la part du salarié, à son poste de travail, et pendant ses heures de travail. Lorsque celui-ci est constaté, alors le salarié n’est plus rémunéré, et son contrat de travail est suspendu. Il convient toutefois de noter que ce dernier fait toujours partie intégrante des effectifs de son entreprise.Cette précision étant effectuée, il convient de se demander quelles étaient les règles applicables à l’abandon de poste avant l’entrée en vigueur du décret du 17 avril dernier ?
Interrogation en droit du travail
En quoi consistaient les règles précédentes en cas d’abandon de poste ?
Auparavant, et donc avant l’entrée en vigueur de ce nouveau décret et des nouvelles dispositions contenues au sein de l’article L. 1237-1-1 du Code du travail, il revenait à la jurisprudence de traiter de ces règles particulières. Ainsi, il était convenu que l’abandon de poste d’un salarié pouvait utilement justifier le licenciement de ce dernier, et il s’agissait plus exactement d’un licenciement pour faute grave. Cependant, il est à noter, étude faite de la jurisprudence de la Cour de cassation, qu’une telle hypothèse ne permettait pas d’apporter la preuve d’une volonté non seulement claire mais aussi manifeste du salarié de se démettre de ses fonctions. Il était souvent attendu en jurisprudence que le salarié absent rédige une lettre de démission. Très souvent, cependant, un tel courrier rédigé par le salarié, absent sans motif légitime, à destination de son employeur faisait défaut et alors, il revenait aux employeurs de respecter exactement la procédure de licenciement prévue par le Code du travail afin d’acter un licenciement pour faute grave de la part du salarié absent.Les modes de rupture autres que le licenciement
Il convient surtout de retenir qu’il était attendu de l’employeur de procéder à la mise en demeure du salarié de reprendre son poste, ou, à tout le moins de justifier son absence de l’entreprise. Si ce dernier faisait preuve de silence face à cette mise en demeure, en pareil cas, l’employeur était en mesure de mettre en action une procédure disciplinaire qui aboutissait sur le licenciement du salarié. Plus spécifiquement, l’employeur disposait d’une alternative : il pouvait en effet décider de mettre en œuvre la procédure du licenciement pour faute grave, comme précisé ci-dessus, et donc sans procéder à un quelconque versement d’indemnité au bénéfice du salarié, et sans respecter un quelconque préavis ; aussi, il pouvait décider de procéder à un licenciement du salarié pour cause réelle et sérieuse mais ici il convenait de verser l’indemnité de licenciement au salarié.
Le parcours d'un salarié dans l'entreprise, de l'embauche au licenciement pour faute grave
Quelles sont les nouvelles règles en matière d’abandon de poste volontaire ?
Il apparait tout d’abord primordial de souligner le fait que ce nouveau décret prévoit une présomption de démission en cas d’abandon de poste. En fait, il existait un déséquilibre entre les salariés implicitement démissionnaires (ceux qui abandonnaient leur poste) et les salariés expressément démissionnaires, ces derniers ne pouvant pas obtenir d’indemnité chômage.Comprendre le droit du travail : principes, protections et procédures
Ainsi, ce décret du 17 avril 2023 est intervenu à l’effet de contrecarrer ce déséquilibre et de mettre en œuvre une présomption de démission pour les salariés qui abandonneraient leur poste.
Plus exactement, celui-ci apporte un certain nombre de précisions sur cette situation qui est somme toute relativement courante dans le monde du travail.
En effet, il est intéressant de noter que lorsqu’un employeur constate qu’un salarié est absent de son poste de travail, pendant ses heures de travail, de manière injustifiée, alors ce dernier est en mesure de procéder à une mise en demeure du salarié, par lettre recommandée avec accusé de réception, de justifier son absence mais aussi et surtout de revenir à son poste.
Quels sont les mécanismes et les effets de la mise en demeure ?
Quel est le contenu de cette lettre ?
Le contenu de celle-ci est relativement simple : effectivement, elle doit comprendre une demande effectuée par l’employeur visant à obtenir la justification de l’absence du salarié et comprendre un délai d’au moins quinze jours calendaires laissé à ce dernier pour retourner à son poste. C’est à l’issue de ce délai minimal que le salarié sera présumé avoir démission s’il ne reprend pas son poste ou s’il ne répond pas à la lettre de mise en demeure de son employeur. Ici, il conviendra pour l’employeur d’actionner la procédure dite de présomption de démission. Pour le moment, et en attente d’un retour de la part du Conseil d’Etat, qui a été saisi d’un recours pour excès de pouvoir, l’employeur ne saurait faire autrement que d’actionner cette procédure ; dit autrement, il ne lui est plus possible de mettre en mouvement la procédure du licenciement pour faute.
Il est tout à fait envisageable que cette présomption ne soit pas opérante : il convient en effet de se reporter aux dispositions de l’article R. 1237-13 du Code du travail qui prévoient que le salarié peut justifier d’un motif légitime eu égard à son abandon de poste.
Il est également opportun de relever une règle importante : il revient au salarié de respecter, par principe, le préavis de démission qui s’impose à lui et pour le cas où son employeur déciderait de ne pas l’en exempter. Il est par conséquent attendu du salarié qu’il exécute ses missions et ce, jusqu’à ce que le préavis soit expiré. C’est l’expiration de ce délai de préavis qui met fin au contrat de travail en cause. L’employeur est soumis à certaines obligations, à savoir : la remise des documents de fin de contrat au salarié. En outre, l’attestation Pôle emploi comprendra le motif de la rupture de ce contrat, c’est-à-dire une démission : l’inscription de ce motif a de lourdes conséquences pour le salarié puisque ce dernier ne peut obtenir l’allocation d’assurance chômage.
Finalement, il est intéressant de noter que le salarié aura toujours la possibilité de saisir le Conseil des prud’hommes à l’effet de contester cette présomption de démission dans deux cas principaux : si celui-ci considère que la procédure susmentionnée n’a pas été observée ou bien s’il a justifié son absence.