Quelques éléments introductifs nécessaires
Avant d’entrer dans le vif du sujet et de nous intéresser davantage aux problématiques inhérentes à ce choix de scinder en deux parties le projet de loi sur la fin de vie en France, il apparait nécessaire de formuler quelques propos introductifs.
De la sorte, ce texte, qui a déjà fait tant couler d’encre et suscité de vives émotions parmi ses partisans mais aussi et surtout ses détracteurs, est aujourd’hui scindé en deux parties distinctes l’une de l’autre. Ce texte a connu des débuts et une vie parlementaire bien difficile dans la mesure où il fut tout simplement ajourné à la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale par le Chef de l’Etat en juin dernier, avant d’être retardé dans ses discussions par la motion de censure en fin d’année 2024, ce dernier s’est dernièrement vu scindé en deux sur décision de François Bayrou, le Premier ministre. Le destin parlementaire de ce projet de loi sur l’accompagnement des malades et de la fin de vie en France a en effet été la victime d’un retournement de situation tout à fait remarquable par le Premier ministre. Maintenant il s’agira de deux textes dont le contenu sera bien distinct, à savoir : des règles relatives aux soins palliatifs pour l’un, des règles relatives à l’euthanasie et au suicide assisté pour l’autre. Cette proposition, qui a fait grand bruit, ne semble cependant pas totalement inédite, en ce que le Chef de l’Etat avait déjà eu l’occasion d’évoquer cette hypothèse, avant que celle-ci ne soit finalement démentie par l’entourage d’Emmanuel Macron.
Qu’en est-il du calendrier de discussion de ces deux textes ?
Il nous est nécessaire de noter que le contenu exact de ces textes est inconnu pour le moment mais nous pouvons retenir que ces deux contenus devraient s’inscrire dans la continuité de ce qui avait été présenté à l’occasion du texte initial. Concernant d’abord les soins palliatifs, le projet devrait permettre la mise en place de la stratégie décennale qui avait été annoncée, par la création des maisons d’accompagnement. Il faut noter que les soins palliatifs constituent un sujet relativement consensuel, ce qui n’est pas réellement le cas des « soins d’accompagnement », parmi les soignants. Ensuite, eu égard à l’aide à mourir (c’est-à-dire le suicide assisté ainsi que l’euthanasie dans des cas bien déterminés), il faudra que le projet détermine avec précision les modalités d’accès ainsi que les conditions à ce sujet.
Le calendrier des discussions des textes et de leur cheminement parlementaire est toutefois incertain. Retenons qu’à l’occasion de son discours de politique générale, le Premier ministre avait déclaré qu’il désirait en laisser l’initiative aux parlementaires. Rappelons que l’examen du projet de loi initial avait eu lieu sur un peu plus d’un mois ; l’examen de ces deux textes distincts ne pourra être effectué sur un temps beaucoup plus court. Néanmoins et afin de mettre en œuvre le déploiement de la stratégie décennale qui débute cette année, il est fort probable que le pouvoir exécutif choisisse finalement d’actionner la procédure accélérée concernant la loi sur les soins palliatifs uniquement.
Une scission qui fait débat ?
Cette question de savoir si une telle scission du texte fait en effet débat est importante. En effet nombre de soignants y sont favorables et applaudissent le choix du Gouvernement à cet égard. Ainsi le collectif Soins de vie (qui comprend les organisations contre toute aide à mourir) salue cette décision gouvernementale. Selon ce collectif, la décision ainsi prise « offre davantage de clarté dans le débat » et celle-ci vise à « répondre à un impératif éthique » qui, pour ses membres, oblige tous les soignants.
C’est à l’occasion d’un communiqué que le collectif a souligné les grandes difficultés actuelles pour tout d’abord l’accès aux soins palliatifs et les inquiétudes parmi les soignants. Et ce collectif d’ajouter dans ce même communiqué que « l’euthanasie et le suicide assisté » constituent en vérité deux pratiques « [contredisant] radicalement l’éthique du soin » qui gouverne les pratiques soignantes actuellement. Au surplus, la mise en œuvre de cette proposition ne saurait valablement être effectuée alors même que les équipes sont sous-dotées.
Maintenant, il nous faut relever les considérations apportées par certains parlementaires à cet égard et qui considèrent in fine que la séparation de ce texte constitue d’une certaine manière une incohérence. De la sorte, par exemple, Olivier Falorni, député et membre des Démocrates (pour rappel ce mouvement a été crée par le Premier ministre actuel), a déposé une proposition de loi trans-partisane dans l’attente d’un projet de loi. Ce dernier a déclaré qu’accompagner la fin de vie se base sur « deux piliers complémentaires », et de préciser à cet égard que les soins palliatifs constituent « la réponse primordiale » tandis que l’aide à mourir constitue, pour sa part, « l’ultime recours ».
De même, Aurélien Rousseau, actuel député socialiste, et ancien ministre de la Santé, a précisé à ce sujet, que le principe d’unicité du texte en cause doit être respectée dans la mesure où il en va de « la cohérence et l’éthique » dudit projet, celui-ci ayant par ailleurs été « nourri par la convention citoyenne ».
On le voit donc, la question fait débat parmi ses défenseurs et ses détracteurs. Ne faudrait-il pas considéré finalement que les volets en cause sont bien complémentaires et que, par conséquent, ils imposent un débat commun ?
Références
https://rmc.bfmtv.com/actualites/politique/censure-nouveau-gouvernement-ou-en-est-la-loi-sur-la-fin-de-vie_AV-202501170322.html
https://www.ouest-france.fr/societe/fin-de-vie/fin-de-vie-le-retour-du-projet-de-loi-au-parlement-suspendu-a-ladoption-du-budget-3bd5efd0-dc8d-11ef-8f83-1be9a95f1bed
https://www.liberation.fr/societe/sante/loi-sur-la-fin-de-vie-les-deputes-remontes-contre-la-scission-du-texte-en-deux-volets-voulue-par-bayrou-20250128_SKCW5APPZZEWVAG2OYIDIXCGEA/
https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/01/29/fin-de-vie-francois-bayrou-tente-d-imposer-sa-partition-aux-partisans-de-l-aide-a-mourir_6521250_3224.html