Le gouvernement, contraint de revoir (en partie) sa copie

C’est à la suite des annonces du Chef de l’État, lors de son allocution du 12 juillet dernier, que le gouvernement a transmis au Conseil d’État son « projet de loi relatif à l’adaptation de nos outils de gestion de la crise sanitaire » afin que les juges du Palais Royal donnent leur avis à ce sujet.

Sans grande surprise, la Haute juridiction de l’ordre administratif français, lors de sa décision rendue le 19 juillet, a validé une grande partie du texte qui lui était présenté ; cependant, quelques parties sont à revoir, ces parties ayant été soit complètement retoquées soit précisées par les juges.

Le gouvernement s’est alors réuni en fin de journée, lundi 19 juillet, après réception de cet avis, afin d’apporter les modifications nécessaires au projet de loi. Ce dernier sera présenté à l’Assemblée nationale puis au Sénat dans le courant de la semaine afin que le texte soit débattu par les parlementaires. Des amendements sont par ailleurs prévus par l’opposition, même si ce projet de loi devrait entrer en vigueur dans quelques semaines, a priori, au tout début du mois d’août.

En partie validé, le projet de loi doit toutefois être remanié par l’exécutif.

L’isolement obligatoire, une validation partielle

Tout d’abord, au titre des mesures validées par le Conseil d’État, se retrouve l’isolement obligatoire d’une durée de dix jours pour l’ensemble des personnes qui ont été contaminées par le virus. Toutefois, cette mesure n’est pas entièrement validée en ce que les juges ont demandé à ce que les horaires de contrôle par les autorités compétentes soient limités. Les juges ont ainsi recommandé que soit « [précisé] expressément que les contrôles ne peuvent avoir lieu en période nocturne ». En outre, le Conseil d’État, dans son avis, a proposé que cet isolement obligatoire puisse être levé avant l’expiration du délai prévu à dix jours si les personnes concernées réalisent un nouveau test qui s’avérerait négatif.

Cette recommandation fut actée par l’exécutif puisque Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, a annoncé qu’il n’y aurait pas de contrôles des forces de l’ordre entre 23h et 8h du matin pour les personnes placées à l’isolement obligatoire.

Quid des centres commerciaux initialement visés par le pass sanitaire ?

Concernant les centres commerciaux, initialement visés par le pass sanitaire, les juges du Palais Royal ont considéré que cette obligation de présentation d’un pass sanitaire n’est pas valide et ont ainsi retoqué la proposition du gouvernement. Pour retoquer cette proposition, le Conseil d’État a retenu que celle-ci serait considérée comme « une atteinte disproportionnée aux libertés » en ce qu’elle est « susceptible de concerner tout particulièrement l’acquisition de biens de première nécessité, notamment alimentaires ».

Une atteinte disproportionnée aux libertés ? En effet, la Haute juridiction de l’ordre administratif a précisé à l’occasion de cet avis que la proposition en cause porterait atteinte aux libertés des individus qui ne peuvent se faire vacciner, notamment pour des raisons de santé, et qui seraient amenés à se faire dépister « très régulièrement » afin de pouvoir accéder auxdits centres commerciaux. Ainsi, peu importe pour le Conseil d’État la superficie des centres commerciaux, le pass sanitaire ne pourra être valablement instauré à leur entrée ; pour rappel, le gouvernement avait proposé que seuls les centres commerciaux de plus de 20 000m2 y soient soumis. Or Gabriel Attal a fait savoir, dans la soirée du 19 juillet, que le gouvernement maintiendra cette obligation de présentation d’un pass sanitaire à l’entrée de certains centres commerciaux (la superficie de ces centres sera précisée ultérieurement par un décret).

Quid enfin des amendes pour non respecter des règles prévues ?

Parmi ses nombreuses propositions, soumises pour avis au Conseil d’État, l’exécutif avait prévu une amende d’un montant de 9000€ en cas de manquement à l’obligation de contrôle du pass sanitaire dans les lieux dans lesquels celui-ci devra être instauré. Néanmoins, les juges du Palais Royal, non hostiles à une telle amende, ont proposé que celle-ci soit abaissée à un montant de 1000€, le montant initialement proposé par le gouvernement étant jugé disproportionné.

Cependant, le porte-parole du gouvernement est venu préciser que le montant de la contravention pourra être porté à 1500€ (pour les personnes physiques) et 7500€ (pour les personnes morales) qui ne respecteraient pas cette obligation de contrôle du pass sanitaire. Celui-ci a par ailleurs indiqué qu’à partir de la « troisième réitération, cela passe à un délit » pouvant être sanctionné d’un an de prison et 9000€ d’amende (pour les personnes physiques), et, un an de prison et 45000€ d’amende (pour les personnes morales).

Quelques précisions supplémentaires

La situation des salariés de lieux de loisirs, mais aussi celle des salariés de bars et de restaurants, sont également visées par les dispositions du projet de loi proposé par l’exécutif. En ce sens, le porte-parole du gouvernement a énoncé que ces salariés seront exigibles au pass sanitaire et ce, à compter du 30 août prochain. Toutefois, ce dernier a tenu à rassurer en expliquant qu’une période « de rodage » sera bien mise en place, néanmoins pour une durée restreinte, une semaine ou une dizaine de jours, afin de pouvoir « accompagner les professionnels » concernés.



Sources :

- Passe sanitaire: le Conseil d’État valide largement le projet de loi du gouvernement - Le Figaro
- Pass sanitaire : après le passage au Conseil d’Etat, le gouvernement amende sa copie - Libération
- Pass sanitaire : les sanctions assouplies, incertitude sur les centres commerciaux - Les Échos
- Covid-19 : ce que contient le projet de loi sanitaire que les députés s'apprêtent à examiner - LCP