Le parquet européen est souhaité par les États membres. Cependant, sa mise en place a posé plusieurs difficultés. Elle a notamment fait couler de l'encre par rapport au conflit qu'il résulterait de son existence avec l'agence de coopération judiciaire, Eurojust.



La mise en place du parquet européen

Actuellement, le parquet européen qui entrera en vigueur en 2020 est issu d'un projet de règlement porté par vingt États membres devant le Conseil européen. Initialement, le texte visant à instituer un parquet européen est l'article 86 du traité de Lisbonne.

Il prévoit que cette institution sera adoptée par l'unanimité des États membres après l'approbation du Parlement européen. Un tel projet de règlement est en cours de négociation, mais il date du 17 juillet 2013.

Le parquet européen qui verra le jour est issu de la procédure spéciale visée à l'article 86 du traité de Lisbonne. Il prévoit que neuf États membres pourront porter un projet de création de parquet européen devant le Conseil européen. Le règlement du 12 octobre 2017 permettra son entrée en vigueur en 2020. Cette procédure risquait davantage d'aboutir en raison des nombreuses cultures juridiques et la souveraineté des Etats à prendre en compte.

Pourtant cette institution a été très demandée par les États membres, notamment la France et l'Allemagne qui ont contribué à son élaboration lors de discours des ministres de la justice. À ces occasions, des préconisations ont été avancées auprès de la Commission européenne pour établir ce projet. Mais, celle-ci a fait preuve de résistance en ne voulant pas créer une seconde agence Eurojust.


Le conflit avec l'agence EUROJUST ?

L'agence Eurojust est un organisme parallèle à Europol. Chacun vise respectivement la coopération judiciaire et policière. Eurojust permet notamment une coopération dans le cadre des enquêtes telles que celles relevant des attentats du 13 novembre 2015 à Paris, puis des attentats de Bruxelles, permettant une extension à l'international.

Le domaine d'Eurojust n'est pas limité. Cependant, il n'a aucun pouvoir de poursuite. Il ne sert que de support et d'outils pour organiser les enquêtes, résoudre les conflits de compétences et permettre plus d'efficacité, dès qu'un État membre est concerné, même indirectement.

Au commencement, il était prévu que le parquet européen soit créé « à partir d'Eurojust ». La base était là, il suffisait de la développer. C'est sur cette idée que la Commission a développé le règlement pour la création d'un parquet européen. Le parquet devait initialement être une institution à part entière, sans fonctionnement en bureau par État comme pour l'agence Eurojust, avec des procureurs indépendants et un droit de poursuite.

Or, la volonté des Etats a été différente comme l'ont exprimé les ministres de la justice français et allemand. C'est suite au blocage par les parlements nationaux que la Commission européenne a revu ses positions. Le parquet européen fonctionnera donc en bureau sous des procureurs par États membres qui connaîtront mieux le droit et les méthodes d'enquête nationales. Ils seront sous la supervision d'un procureur général européen. De plus, le domaine de compétences du parquet sera limité aux infractions sur l'atteinte aux intérêts financiers de l'Union européenne avec une possible extension au terrorisme et à la criminalité organisée.

Le parquet européen agira de concert avec l'agence Eurojust, mais également avec Europol, l'OLAF et d'autres organisations qui pourront l'aider à mener ses enquêtes. Il s'agit ainsi davantage d'une coopération entre les institutions et agences qu'une rivalité puisqu'elles ont des champs et des compétences différentes.


Qu'en retenir ?

Le parquet européen est une nouvelle avancée voulue par les États, mais modérée. Un réel pouvoir régalien sera transmis à l'Union européenne dans les domaines concernés. Mais il reste tout de même des Etats réticents comme le Royaume-Uni avant que la question du Brexit n'entre en jeu, ou encore le Danemark. Il demeure également une réticence générale qui se traduit par exemple dans la fraude à la TVA, qui restera pour le seuil inférieur à dix millions d'euros de la compétence nationale.


Sources : Dalloz ; RSC 2018 p.647, Lectures appliquées comparées. « Le parquet européen et l'agence Eurojust : je ne t'aime, moi non plus ! » ; RSC 2018 p.653 Lectures appliquées comparées. Les autorités françaises et le parquet européen


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