Agression sexuelle et viol : de quoi parle-t-on ? 

La lecture des articles 222-22 et 222-23 du Code pénal nous renseigne respectivement sur la définition légale de l’agression sexuelle et du viol. Ainsi, revêt la nature d’une agression sexuelle « toute atteinte sexuelle commise avec violence, menace ou surprise ou, dans les cas prévus par la loi, commise sur un mineur par un majeur. » Pour sa part, le viol se définit comme suit : « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol. »


La lecture de ces deux articles nous permet donc de conclure sur le fait que le viol constitue une catégorie d’agression sexuelle, la singularité de la notion de viol se retrouvant dans l’« acte de pénétration ». 

Si le viol constitue une agression sexuelle, il n’en demeure pas moins qu’une agression sexuelle ne revêt pas fatalement la nature d’un viol.

L’on comprend aussi de cette lecture que le Code pénal s’intéresse expressément au comportement de l’auteur des faits, non pas d’un quelconque consentement de la victime de l’acte. Cette indifférence des textes se comprend eu égard à la nature même de ces infractions pénales qui sont spécifiquement intentionnelles. Il faut alors la rencontre d’un élément moral (c’est-à-dire le fait réalisé par l’auteur lui-même, qu’il s’agisse par ailleurs d’une action ou bien d’une omission) et d’un élément moral (à savoir : l’intention pour l’auteur des faits de commettre en effet l’élément matériel susmentionné et ce, de manière intentionnelle, délibérée). 


Revenons maintenant sur l’arrêt rendu par la Chambre criminelle en mai 2024

Dans notre cas d’espèce ici jugé et rapporté par la Chambre criminelle de la Cour de cassation, en date du 15 mai 2024 (cf. n° de pourvoi : 23-85.034), les juges sont intervenus afin de corriger la décision rendue par les juges de la Cour d’appel de Douai à ce sujet. 

La Chambre criminelle relève de l’arrêt d’appel que les juges s’étaient intéressés au fait que l’auteur n’avait en vérité pas « conscience de l’absence de consentement » de la victime. Cependant, et sans véritable surprise, cette vision du droit n’a pas emporté l’adhésion de la Cour de cassation qui, par cette décision, est restée constante dans sa jurisprudence et dans sa lecture et son interprétation des textes. De la sorte, ce sont bien les éléments qui constituent l’infraction en cause qui « caractérisent le défaut de consentement de la victime ». L’existence de ces éléments doit en outre être déduite aussi bien du comportement de l’auteur des faits que de la commission du fait en elle-même. 


En fait, dans notre cas d’espèce, et en application des dispositions contenues au sein des articles susmentionnés en propos introductifs de notre développement, mais aussi de manière conforme à sa jurisprudence constante en la matière, la Chambre criminelle de la Cour de cassation procède au rappel de la règle suivante que doivent respecter tous les juges en pareille hypothèse : il leur revient soit de caractériser l’infraction en cause, ou bien l’absence d’une telle infraction, le tout en prenant en considération les agissements de l’auteur des faits, et de son intention. 

En l’espèce, les juges de la Cour de cassation ont reproché aux juges de la Cour d’appel de Douai de ne pas avoir examiné si le comportement en cause, conformément aux circonstances de l’espèce, permettait de caractériser ou pas l’acte poursuivi. 

Pour clore, il nous faut cependant bien préciser maintenant qu’en dépit d’une absence de la notion de consentement au sein des textes susmentionnés, il n’en demeure pas moins que les juges de la Chambre criminelle de la Cour de cassation ne font pas totalement fi de celle-ci. En fait, le consentement ou non de la victime s’analyse en considération des agissements de l’auteur des faits poursuivis (cette analyse ne s’effectue donc pas de manière indépendante comme l’ont fait les juges du second degré en l’espèce). 

L’on peut retenir que l’individu est n’est pas consentant lorsqu’il subit en effet une atteinte sexuelle par violence, menace, contrainte ou surprise conformément à l’article 222-22 du Code pénal. Néanmoins, celui-ci sera consentant lorsqu’en effet, celui-ci se laisse atteindre sexuellement, et que l’auteur des faits n’emploie ni violence, menace, contrainte ou surprise. Il conviendra aussi de prendre en considération les circonstances qui entourent la commission de l’acte en cause. 

La Cour de cassation, en l’espèce, a par voie de conséquence décidé de casser et d’annuler l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Douai en ce sens où cette dernière n’a pas procédé à un bon examen du fait matériel, et ne l’a donc pas effectué en regard des circonstances qui entouraient la commission de l’acte en cause. 


Pour être plus exact, les juges de la Cour d’appel de Douai ont examiné les circonstances qui entouraient l’infraction mais ce faisant, ils ont pu déduire qu’il n’existait pas d’élément moral de l’infraction, alors même qu’ils auraient dû tenir compte de l’élément matériel de celle-ci, et donc des agissements de l’auteur des faits lors de la commission de ces derniers. Il conviendra de garder à l’esprit qu’il convient en effet d’examiner les circonstances en présence dans un cas d’espèce, mais cet examen doit en parallèle permettre attirer l’attention du juge sur les deux éléments constitutifs d’une infraction pénale. Ainsi, la censure de l’arrêt d’appel n’apparait pas comme une décision inédite et se comprend pleinement par le constat suivant : les juges n’ont fait qu’analyser les circonstances mises en avant en l’espèce et ce, indépendamment de toute prise en considération des faits matériels effectivement reprochés à l’auteur des faits…