Des pouvoirs détenus, mais limités dans la pratique

Comme nous l'avions exposé dans un précédent article au regard de la nomination et des pouvoirs du Premier ministre britannique, le Royaume-Uni ne bénéficie pas d'un texte unique écrit qui codifierait l'ensemble des compétences et des pouvoirs attribués à chacune des composantes de l'État.

Il est tout d'abord intéressant de noter que l'ensemble des pouvoirs détenus par le monarque britannique sont limités. Ils l'ont été progressivement au cours de l'histoire par ce que l'on appelle les conventions de la Constitution, mais l'ont aussi été par l'édiction d'un certain nombre de textes, et notamment, le Bill of Rights qui a expressément prévu la souveraineté du Parlement, composé de la Chambre des Lords et de la Chambre des communes. Nous pouvons observer que le monarque britannique dispose, entre autres, des pouvoirs de promulgation de la loi (le Royal assent), de nomination du Premier ministre britannique ou encore de déclarer la guerre. Cela dit, il nous faut souligner une information de taille : la grande partie de ces pouvoirs sont dans la pratique directement assumés par les membres du gouvernement. Concernant plus spécifiquement la promulgation des lois, il s'agit plus d'un pouvoir symbolique que d'un pouvoir effectif en ce qu'aucune loi ne fut refusée par un monarque depuis 1708, sous le règne de la Reine Anne. En outre, les parlementaires britanniques conseillent le monarque et cela s'illustre dans la pratique annuelle du King's speech. À cette occasion, le monarque délivre un discours devant le Parlement et qui est rédigé par le gouvernement. Il contient notamment les grandes lignes des projets législatifs souhaités par le Gouvernement pour l'année à venir.

Un rang purement symbolique ?

S'il est vrai que le monarque britannique ne doit pas s'immiscer dans le processus démocratique du pays, il ne dispose pas pour autant d'un simple rang symbolique lorsqu'il représente l'État. En vérité, même si le monarque doit choisir le Premier ministre parmi le parti politique majoritaire au Parlement, il a pu arriver, dans la pratique, qu'aucun nom ne se dégage naturellement. Ainsi, la reine Elizabeth II avait dû, à deux reprises, effectuer un choix important en la matière même si elle fut conseillée pour y procéder en effet. Notons également que pour toutes les lois qui intéressent explicitement la famille royale, le monarque britannique dispose d'un droit de regard les concernant (Elizabeth II avait en effet usé de ce droit à plusieurs reprises, c'est ce que l'on appelle le royal consent).

Il est aussi utile de souligner le fait que le monarque britannique est synonyme de stabilité de l'État et assure une certaine immuabilité des institutions. Le monarque assure finalement l'unité de la nation britannique en exerçant une neutralité politique qui le place en dehors des rivalités partisanes.

La mort de la reine Elizabeth II n'est pas sans conséquence pour la monarchie britannique. En effet, les tâches qui incombent maintenant au nouveau roi Charles III sont nombreuses. Nous pouvons effectivement souligner le fait que celui-ci accède au trône alors que la famille royale a été l'objet de nombreuses critiques de la part de la presse britannique (soupçons d'évasion fiscale, scandales sexuels pour le prince Andrew). Surtout, nous pouvons noter que le Commonwealth est lui aussi dans une situation somme toute particulière.

L'accession au trône de Charles III à l'épreuve de la question du Commonwealth

Charles III a accédé au trône alors même que le Commonwealth est actuellement dans une situation particulière. Tout d'abord, qu'est-ce que le Commonwealth ? En quelques mots, le Commonwealth est une organisation intergouvernementale composée par 56 États membres qui correspondent globalement aux anciennes colonies de l'Empire britannique, soit environ 1/3 de la population mondiale actuelle.

Ces derniers ont adhéré à une Charte qui comprend l'ensemble des valeurs partagées par eux-mêmes (par exemple, le respect de la démocratie, le respect de la liberté d'expression, etc.). Il y a donc un partenariat mis en place pour ces États membres qui sont par ailleurs libres, mais aussi égaux les uns envers les autres. Le monarque britannique est à la tête du Commonwealth.

Toutefois, de nombreux États du Commonwealth montrent aujourd'hui des appétences indépendantistes même si tous ont rapidement reconnu Charles III comme leur nouveau monarque. L'on peut prendre comme exemple l'Australie dont une part de plus en plus conséquente de la population souhaite que le pays prenne la forme d'une République, même si aucun référendum sur la question n'est pour le moment prévu.

Quid cependant de l'Écosse et de l'Irlande du Nord ? Le continent européen n'est pas non plus épargné par ces volontés indépendantistes et républicaines. Au sein même du Royaume-Uni, il semble que deux États souhaitent vivement prendre leur indépendance et dont les volontés républicaines semblent avoir été exacerbées par le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne : l'Écosse et l'Irlande du Nord. À ce sujet, Liz Truss avant d'accéder aux fonctions de Première ministre du Royaume-Uni avait déclaré être fermement opposée à tout référendum sur la question. Cependant de son côté et en opposition avec la philosophie du gouvernement britannique, la Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, assure être favorable à l'organisation d'un nouveau référendum sur l'indépendance du pays qui devrait se tenir à l'automne 2023.

Nul doute que la mort de la reine aux 70 ans de règne, qui était parvenue à maintenir la monarchie britannique au travers de nombreuses crises politiques et historiques, a ouvert la porte à de nouvelles aspirations auxquelles devra faire face Charles III.

 

Sources : Angleterre.org, Les Surligneurs, Le Monde, France Bleu