Que prévoit le droit français quant à la responsabilité des parents ?
Il est utile de commencer notre développement en précisant que les parents dits « défaillants » sont d’ores et déjà sanctionnables tant du point de vue du droit pénal que du droit civil.
Ainsi, selon les dispositions de l’article 371-1 du Code civil, il est notamment prévu que l’autorité parentale consiste en l’ensemble « [des] droits et [des] devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant ».
Depuis le 19 février 1997, les deux parents sont responsables de plein droit eu égard aux agissements de leur enfant mineur (cf. Cass., 2e civ., Bertrand). Ils seront en mesure de s’exonérer de leur responsabilité civile s’ils apportent la preuve qu’ils n’ont pas commis de faute par exemple.
Conformément aux dispositions de l’article 1242, al. 4, du Code civil, lorsque les parents exercent l’autorité parentale, ils sont considérés comme « solidairement responsables » de tout dommage causé par leur enfant « mineur habitant avec eux », qu’il s’agisse d’un simple fait de l’enfant, ou que son acte soit le fait générateur du dommage et si l’autorité parentale est exercée conjointement (cf. respectivement Cass. Ass. Pl., 09/05/1984 et 13/11/2002). Il est aussi à noter que le droit civil français intervient pour condamner les parents considérés comme indignes comme tel est le cas de la déclaration judiciaire de délaissement parentale (cf. la loi n°2016-297 du 14 mars 2016 et l’article 381-1 du Code civil).
Finalement au titre du droit pénal français, il est aussi possible pour le juge pénal, dans le cadre de la protection des victimes de violences conjugales, de retirer l’autorité parentale ou l’exercice de l’autorité parentale au parent violent (cf. la loi n°2020-936 du 30 juillet 2020). Aussi, conformément à l’article 227-17 du Code pénal, les parents qui se soustraient à leurs responsabilités peuvent faire l’objet de poursuites pénales dès lors qu’ils « [compromettent] la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de [leur] enfant (…) » (cf Cass. crim., 20/06/2018, n° 17-84.128).
Par conséquent, il existe bel et bien aujourd’hui en France un arsenal de règles juridiques en matière civile mais également pénale eu égard à la défaillance des parents. N’omettons pas non plus les règles juridiques existantes et qui attraient précisément à la lutte contre la maltraitance des enfants et qui peut revêtir diverses natures, aussi bien psychologique, physique que sexuelle…
Vouloir instaurer de nouvelles règles en la matière : du populisme juridique ?
Les idées avancées par le Gouvernement en réponse aux résultats des émeutes ayant eu lieu au début de l’été 2023 ne viseraient qu’à assouvir la grogne populaire qui semble réclamer sans cesse de nouvelles mesures toujours plus strictes à l’encontre des enfants délinquants et plus exactement de leurs parents.
Ce qui est intéressant à noter réside dans le fait que le rapport Varinard puis le rapport Bockel, respectivement publiés en 2008 et 2010, s’intéressaient tous les deux à la manière de faire afin d’asseoir et accroitre la responsabilisation des parents d’enfants mineurs et qui, du fait de leurs agissements, étaient mis en cause par la justice. Une nouvelle infraction avait par ailleurs été proposée dans le rapport Varinard et qui aurait résidé dans la « non-comparution du civilement responsable » lors d’un procès.
La proposition d’Aurore Bergé était d’instaurer un TIG aux parents défaillants et ce, dans l’optique de les responsabiliser. Ce TIG, en droit pénal, est constitutif d’une sanction prononcée par le tribunal correctionnel et dont la durée varie d’un justiciable à l’autre, à l’encontre d’une personne condamnée suite à la commission d’une infraction. Il ne pourra cependant pas s’agir de toutes les infractions puisque seuls certains délits et certaines contraventions peuvent résulter sur une telle sanction. L’individu travaillera de manière non rémunérée soit pour une association, soit pour un service public.
Au vu du paragraphe précédent, cette proposition gouvernementale prête immédiatement le flan à la critique. En effet, comment une sanction prononcée par le tribunal correctionnel peut-elle résulter sur un quelconque intérêt d’ordre social d’autant plus que, précision faite, en cas de non-exécution de cette sanction, le justiciable peut se voir infliger une peine d’emprisonnement ?
Cette question étant posée, il est intéressant maintenant de se reporter aux dispositions de l’article L.121-1 et suivants du Code l’action sociale et des familles. Notons qu’à travers l’Aide sociale à l’enfance, il revient au département de coordonner les actions de prévention, de protection de l’enfance. Il existe actuellement des actions de prévention conformément aux dispositions de l’article L. 112-5 du même code et qui intéressent le protocole établi dans chaque département français.
Ce protocole prévoit la manière dont les responsables sont mobilisés et coordonnées à l’égard des priorités afin de soutenir le développement des enfants mais aussi palier les problèmes auxquels leurs parents pourraient se voir confrontés lorsqu’ils exercent leurs responsabilités en matière d’éducation.
La lecture et la compréhension de notre propos doivent nous inciter à retenir qu’il existe des règles de différentes natures plus ou moins contraignantes mais qui doivent en fin de compte être réellement appliquées et respectées par et pour ces parents défaillants dans l’éducation de leurs enfants. Il semble qu’une nouvelle fois, le Gouvernement ait décidé de s’engouffrer dans les attentes populaires d’un meilleur maintien de l’ordre au détriment des (très) nombreuses règles déjà existantes en la matière.
Par conséquent, il ne semblerait pas que l’ajout d’une nouvelle sanction de nature pénale soit nécessaire, qu’il s’agisse de ce fameux travail d’intérêt général que d’une autre sanction de cette sorte. Gageons que les autorités compétentes agissent en sanctionnant les parents effectivement défaillants à l’aide de l’arsenal juridique existant et qui en soi permet de répondre à cette problématique.