La position constante de la Cour de cassation

Une telle interdiction résulte du caractère indisponible du corps humain, qui ne peut faire l'objet d'aucun contrat juridique. De ce fait, une telle mise à disposition n'a jamais été acceptée par la Cour de cassation. Elle a toujours refusé de faire transcrire un acte de naissance étranger en ce qui concerne la mère d'intention. Seul le nom de la mère porteuse peut figurer sur l'acte d'état civil.

En ce qui concerne le père d'intention ou père biologique, la Cour a accepté dans une jurisprudence constante (Civ. 1ère, 29 novembre 2017, n°16-50061) sa transcription sur l'acte d'état civil.

Cependant, cet acte devant manifester la "réalité" de la filiation d'une personne (article 47 du Code civil), la Cour a toujours entendue que cette réalité concernait la réalité de l'accouchement. En aucun cas, il ne s'agit de la réalité maternelle, soit le nom de la mère d'intention.

Bien que la France ait pu être condamnée à plusieurs reprises pour violation de la vie privée des enfants (Affaire Foulon et Bouvet c/ France, CEDH, 21 juillet 2016). La jurisprudence de la Cour de cassation est restée sur le caractère réel que devait transcrire l'acte de naissance. De ce fait, si elle a pu reconnaître un transcription d'un acte de naissance étranger qui énonçait les père et mère biologiques, même suite à une gestation pour autrui, ou encore la transcription du père biologique qui aurait commis une fraude à la loi en utilisant un contrat interdit en France, elle est toujours restée sur ses positions concernant la mère intentionnelle.


Le revirement de jurisprudence du 4 octobre 2019

Dans cet arrêt, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en reconnaissant la possibilité d'établir un lien avec la mère d'intention par la transcription d'un acte de naissance étranger.

Dans les faits, l'acte de naissance a été établi conformément aux jugements de la Cour supérieure californienne. Il mentionne le père biologique et la mère légale, sans qu'elle ne soit la mère d'accouchement. En l'espèce, l'acte a été transcrit à l'état civil français avant qu'un recours en annulation de la transcription ne soit intenté par le ministère public.

Dans un premier temps, la Cour a refusé la transcription aux parents. Cependant, suite à une condamnation de la CEDH en 2014, la Cour a procédé à un réexamen de l'affaire avec un consultation de la CEDH pour reconnaître le lien de la mère d'intention. La Cour européenne conclut que le lien doit pouvoir être établi, mais elle laisse le moyen de cet établissement à l'appréciation de chaque Etat.

C'est en suivant ce raisonnement de la Cour européenne, que la Cour de cassation a pu rendre cet arrêt. En mettant en avant l'intérêt supérieur de l'enfant, reconnu par l'article 3 paragraphe 1 de la Convention de New York sur les droits de l'enfant et le respect au droit à la vie privée de l'enfant de l'article 8 de la CEDH, en y portant pas une atteinte disproportionnée.

La Cour désormais que le fait que l'enfant soit le fruit d'une gestation pour autrui ne fait pas obstacle à voir la reconnaissance d'un lien avec la mère d'intention. Il faut toutefois que le juge puisse contrôler la validité de l'acte étranger et la réalité du lien entre la mère d'intention et l'enfant, qui doit être depuis longtemps concrétisé.


La jurisprudence relative à la gestation pour autrui, en raison de son caractère délicat et sujet à débat, fut longtemps fermée à une reconnaissance d'un lien entre l'enfant et le père, puis la mère d'intention. De ce fait, ce nouvel arrêt de la Cour traduit une évolution non négligeable de cette jurisprudence.