Éviction des élèves non vaccinés et protocole sanitaire
Le nouveau protocole sanitaire prévoit, uniquement, pour les élèves non vaccinés, s’ils sont cas contacts, l’obligation de s’isoler pendant une durée de 7 jours. Toutefois, une question se pose ici à leur égard : n’existerait-il pas une discrimination pour ces élèves ? Quid du droit à l’éducation ?
Le droit à l’éducation est constitutif d’une liberté fondamentale. Celle-ci est consacrée et protégée aux niveaux national et international. Imposer à ces élèves non vaccinés un tel isolement constitue en vérité une discrimination : cette discrimination repose sur le statut vaccinal de l’élève concerné. Il s’agit plus précisément encore d’une rupture d’égalité sur un service public obligatoire (l’instruction étant obligatoire, en France, pour tous les enfants de 3 à 16 ans révolus). Il faut ici rappeler également que la vaccination contre la Covid-19 n’est pas obligatoire contrairement à la liste des 11 autres vaccins.
Une lacune a aussi été mise au jour concernant les enfants de moins de 12 ans : les collégiens, entrant en classe de 6e. Ces derniers ne sont pas éligibles à la vaccination (pour le moment, en tout cas). Ceux-ci, s’ils sont cas contacts, se voient alors discriminés par rapport à leurs camarades.
Un isolement pour quelle continuité pédagogique ?
Les enfants, cas contacts, qui devront s’isoler pendant la durée de 7 jours doivent continuer à bénéficier de l’instruction obligatoire. Toutefois, il existe une nouvelle lacune concernant la continuité pédagogique, pendant la durée de leur isolement obligatoire.
Si la situation des écoliers est fixée (en cas de contamination, ces derniers ne se rendront pas à l’école et suivront tous les cours à distance), la situation des collégiens et des lycéens est un peu plus complexe. Le protocole sanitaire prévoit que les seuls élèves effectivement vaccinés pourront continuer à se rendre dans leur établissement et suivre les cours en présentiel. Or il revient pourtant à l’Éducation nationale de respecter l’obligation du droit à l’éducation de tous les enfants, de 3 à 16 ans révolus. Ici, il y a bien une atteinte apportée au droit à l’éducation des enfants, et, en pareil cas, l’État engage sa responsabilité pour le cas où un élève est privé de cours pourtant obligatoires.
Élèves en isolement et recours juridiques possibles
Si des élèves, non vaccinés et cas contacts, se retrouvent en isolement obligatoire, les parents de ces derniers pourront bien évidemment agir sur le plan juridique. Comment doivent-ils s’y prendre ? Les parents dont les enfants sont scolarisés dans un établissement public sont en mesure de saisir le juge administratif à l’appui d’une procédure d’urgence en référé. Ces derniers devront en fait arguer d’une atteinte à la liberté fondamentale qu’est le droit à l’éducation, et devront aussi arguer d’un doute sérieux au regard de la légalité de cette éviction/isolement obligatoire.
Cette éviction, cet isolement apparaissent de toute manière comme étant contraires au Code de l’éducation (qui consacre et garantit notamment le droit à l’éducation de tous les enfants) d’autant plus que cette éviction est directement basée sur une vaccination pour le moment purement facultative ; cette éviction pourrait finalement être considérée comme étant contraire aux dispositions contenues au sein de la Convention des droits de l’enfant, celle-ci prévoyant notamment que l’intérêt supérieur de l’enfant prévaut en toutes circonstances. Reste à voir, cependant, ce qu’en diront exactement les juridictions compétentes à ce sujet si elles sont saisies.
Protocole sanitaire, attestation de vaccination, cas contact, secret médical
Il est prévu que pour le cas où un enfant est cas contact, les parents de ce dernier devront apporter la preuve qu’il est effectivement vacciné. Cette preuve devra être présentée à l’établissement scolaire dans lequel l’enfant est effectivement inscrit. Toutefois, de nombreuses voix se sont levées concernant cette autre procédure : qu’en est-il du secret médical dans tout cela ? Celui-ci semble en vérité bafoué par cette mesure.
Il faut noter que certains rectorats ont déjà fait savoir qu’il était impossible de demander au personnel enseignant s’ils sont ou pas vaccinés : cette interdiction s’inscrit dans une logique de protection du secret médical. Il devrait donc en être autant pour les élèves.
De la même manière, qui va collecter les attestations de ces élèves ? Les élèves seront-ils en fin de compte discriminés en fonction de leur statut vaccinal ou non ? Ici, dans ce cas particulier, la CNIL (la Commission nationale de l’informatique et des libertés) a bel et bien rappelé que la collecte des données personnelles de santé est soumise à des règles et procédures définies et devant être strictement respectées ; or la collecte de ces attestations doit être protégée par ces règles et procédures.
Une autre question a pu se poser également concernant la préservation du secret médical et elle concerne tout particulièrement les centres de vaccination (qui seront installés soit au sein des établissements scolaires, soit à proximité de ces derniers). Qu’en est-il ici de la confidentialité inhérente aux actes médicaux ? Qu’en est-il de la protection du secret médical qui s’applique à chaque personne, sans considération d’âge ?
Pour conclure, on le voit, si la rentrée scolaire a eu lieu, de nombreuses questions demeurent en suspens concernant le protocole sanitaire et la protection du droit à l’éducation pour les enfants de 3 à 16 ans. Seules les prochaines (probables) procédures engagées par les parents donneront des réponses à ces questions.
Sources :
- Rentrée scolaire : le protocole sanitaire est-il illégal ? - Yahoo actualités
- L'éviction d'élèves non vaccinés est-elle légale ? - Le Figaro
- Aux collèges et lycées, « on aboutit à une discrimination des élèves par rapport à leur statut vaccinal » - Libération