Pourquoi Donald Trump s'intéresse-t-il au Groenland ?
C'est à l'occasion d'une publication spéciale par The Wall Street Journal, à l'été 2019, que les volontés d'acquisition de ce territoire furent révélées puis confirmées par le principal intéressé quelques jours plus tard. Déjà à cette époque, le Gouvernement danois dont dépend le Groenland avait décliné cette offre, créant quelques tensions entre les deux États. S'il est vrai que les propos du président américain n'avaient pas manqué de faire réagir à l'époque, il en a été de même dernièrement. Cette volonté s'explique plutôt simplement : le Groenland dispose de nombreuses ressources naturelles.
Cette volonté expansionniste américaine trouve sa source dans des investissements accrus depuis plusieurs années par différents États dans cette partie du monde, notamment par la Chine et la Russie, alors que le changement climatique a pour effet de faire fondre les glaces en Arctique. Ces terres si spéciales sont en fait dotées de ressources naturelles extrêmement importantes dans le cadre du développement industriel (y sont notamment présentes l'or, le cuivre ou bien l'uranium ou des hydrocarbures).
L'exploitation de ces richesses a d'abord été visée et mise en œuvre par les principaux concurrents des américains, à savoir : la Chine et la Russie qui y investissent massivement à coup de centaines de milliards de dollars. Un pays autre pays nordique, la Norvège, s'est également intéressé aux terres les plus reculées de l'hémisphère nord et a décidé d'extraire les ressources pétrolières situées dans la mer de Barents, dès le milieu des années 2010.
Si les pays de cette zone géographique stratégique s'intéressent tout naturellement aux différentes ressources qu'elle regorge, la Chine s'y est également intéressée. Le gouvernement chinois avait pu se considérer comme « une puissance presque arctique », soulignant également sa participation en qualité de pays observateur du Conseil de l'Arctique. C'est donc dire tout l'intérêt que représente cet espace pour ces puissances. Concernant le territoire du Groenland, retenons aussi que le gouvernement chinois y a massivement investi, en échange de quoi elle a obtenu un accès direct à nombre de ressources naturelles dont regorge ce territoire.
Des investissements massifs au détriment des Etats-Unis ?
Ces investissements massifs dans ce territoire si stratégique ne sont pas vus d'un bon œil par les autorités américaines qui y voient alors une menace à leur encontre. D'autant plus qu’elles considèrent cette région comme étant constitutive d'une extension géographique du continent nord-américain, à l'image de ce que représente actuellement le territoire de l'Etat d'Alaska, qui avait été acheté aux autorités russes en 1867.
Avoir un train de retard par les Etats-Unis alors que deux de ses plus gros concurrents économiques investissent dans cette région du monde n'a pas été entendable dans la seconde moitié des années 2010. D'un point de vue national, le gouvernement de Donald Trump avait annoncé en 2018 que de nouveaux forages auraient lieu au large des côtes alaskiennes : à cela cependant le veto des autorités juridictionnelles de cet État qui rappelèrent qu'il revient au seul Congrès américain d'ajouter en effet des zones dans lesquelles les exploitations d'hydrocarbures sont possibles. Ces difficultés internes ont pu mettre à mal les ambitions portées par le nouveau président des Etats-Unis qui considère cet espace géographique comme un enjeu crucial et économique pour le pays.
Il ne faut pas non plus s'y tromper, car outre la question de la géopolitique bien présente dans les propos de Donald Trump, il faut aussi bien garder en tête qu'ils ont une nature politique certaine. Ces déclarations revêtent la nature d'une réelle emphase agressive à l'encontre de stratégies mises en œuvre par d'autres puissances. Aussi, ces propos dénués de tout sens diplomatique semblent s'inscrire dans une volonté politique de répondre à son propre électorat et à ses attentes, notamment la capacité dont dispose le nouveau président à être un négociateur difficile, néanmoins réaliste. Il prend donc le rôle d'un réel "deal maker" au service des intérêts politiques et économiques américains.
Se pose finalement la question de savoir si les Etats-Unis sont en mesure d'acquérir le Groenland.
Un achat de ce territoire autonome possible ?
Cette question est intéressante du fait même des enjeux que cet immense territoire, d'environ 2,2 millions de kilomètres carrés, représente. Pour y répondre, nous pouvons déjà retenir que cet achat demeure actuellement quasi impossible tant les difficultés pratiques, techniques et juridiques sont importantes. Notons d'abord que l'achat en question ici s'effectuerait par la conclusion d'un traité international. Ce dernier devrait nécessairement être ratifié par l'ensemble des parties en présence, à savoir : le Groenland, le Danemark et enfin les États-Unis. Rappelons que le consentement du Groenland est un obstacle majeur ici et revêt bel et bien la nature d'une condition sine qua non pour la bonne validité du traité international. Toutefois force est aujourd'hui de constater que le Groenland ne souhaite pas faire l'objet d'une nouvelle tutelle comme c'est précisément le cas envers le Danemark. Par ailleurs le gouvernement groenlandais a dernièrement fait savoir que le territoire n'est pas à la vente. Rappelons aussi que le Groenland, s'il ne souhaite pas une nouvelle tutelle, souhaite néanmoins tout le contraire : le gouvernement, suivi par une large portion de la population demande une autonomie accrue vis-à-vis du Danemark, si ce n'est pour certain l'autonomie complète du territoire.
Côté américain maintenant, une approbation du texte requiert la validation du Congrès, composé du Sénat et de la Chambre des représentants qui intervient, pour sa part, dans l'autorisation budgétaire en cause. Contrairement à la situation déjà envisagée en 2019, les deux chambres sont acquises au président Trump et, de ce fait, il pourrait être envisagé un accord des chambres à ce sujet mais rien ou presque ne permettrait véritablement de l'affirmer.
Quid enfin de la situation au Danemark ? Concernant cette troisième potentielle partie, les choses sont aussi claires que pour le gouvernement groenlandais : toute vente de ce territoire est purement et simplement exclue, inenvisageable. Ceci s'explique d'un point de vue historique d'abord, et économique et géopolitique ensuite. En effet le Danemark revendique le Groenland depuis 1775 et surtout il ne souhaite pas, par une vente, abandonner son influence dans la région. Nous pouvons relever qu'une telle proposition d'achat par les Etats-Unis avait déjà été boudée par le passé.
Références
https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/trump-peut-il-faire-main-basse-sur-le-groenland-2141538
https://www.lemonde.fr/international/article/2025/01/09/donald-trump-renoue-avec-l-imperialisme-de-theodore-roosevelt_6489983_3210.html
https://www.francetvinfo.fr/monde/usa/presidentielle/donald-trump/canal-de-panama-groenland-canada-on-vous-explique-ce-qui-se-cache-derriere-les-velleites-expansionnistes-de-donald-trump_7003850.html
https://www.bfmtv.com/international/europe/menaces-d-annexion-par-trump-le-premier-ministre-du-groenland-rappelle-que-le-territoire-appartient-aux-groenlandais_AN-202501110235.html