Liberté, égalité, FRATERNITE : un ensemble de principes constitutionnels

Notre Conseil constitutionnel a décidé, le 6 juillet 2018, dans sa décision 2018-717/718 que l'aide au séjour ainsi que l'aide à la circulation d'une personne qui serait en situation irrégulière, pour le cas particulier où elle est effectuée dans un but humanitaire et de façon désintéressée, ne peut être considérée comme un délit.

Deux QPC avaient été soulevées devant le Conseil constitutionnel par l'avocat de deux personnes condamnées pour avoir aidé des migrants à passer la vallée de la Roya (est du département des Alpes-Maritimes). L'un avait organisé à son domicile un camp d'accueil pour ces personnes, et l'autre les avait conduits dans sa voiture. Au côté d'une militante d'Amnesty International, ces trois protagonistes condamnés avaient été des symboles du délit de solidarité. Ce délit est puni de peines qui peuvent monter à cinq années d'emprisonnement et consiste à aider à l'entrée, à la circulation ainsi qu'au séjour irréguliers.

Pour l'avocat des deux premières personnes condamnées, il s'agissait là de « rééquilibrer la devise française ». Il s'agit en outre d'une « décision importante » dans la mesure où la fraternité est érigée, comme l'égalité et la liberté, au rang de principes constitutionnels.


L'aide aux migrants : des conditions strictes

La loi prévoyait qu'aucune poursuite ne pouvait être mise en oeuvre dès lors que l'aide aux migrants ne donnait lieu à aucune « contrepartie directe ou indirecte » et que cette aide visait précisément à « préserver » soit la dignité soit l'intégrité physique des migrants.

Or il est nécessaire, pour éviter toute poursuite, d'apporter la preuve de ces différentes conditions ce qui rend la preuve extrêmement difficile.

En ce sens, le Conseil constitutionnel est intervenu pour exempter de toute poursuite l'aide qui est apportée aux migrants dans un but humanitaire.


Quel impact pour cette décision ?

Si les membres du Conseil constitutionnel ont considéré que la fraternité est érigée au rang de principe constitutionnel, il n'en reste pas moins qu'aider à l'entrée sur le territoire français demeure une infraction. C'est en ce sens que Gérard Collomb, l'ex-ministre de l'Intérieur, a considéré que cette décision confortait « pleinement la politique du gouvernement ».

En fait, cette déclaration de l'ex-ministre de l'Intérieur est révélatrice d'une subsistance de ce délit de solidarité. C'est précisément en ce sens que Serge Slama, Professeur de droit public au sein de l'Université Grenoble Aples, a déclaré que « le délit de solidarité n'est pas abrogé ». En ce sens, l'article L.622-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile subsiste.

Cependant, cette immunité humanitaire dont il est fait mention au sens de ces deux décisions QPC du Conseil constitutionnel se voit « confortée et constitutionnalisée », toujours selon lui.


Sources : Article L622-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Décision n 2018-717/718 QPC du 6 juillet 2018, Huffingtonpost, Le Monde