Souvenez-vous, en juin 2021, le Conseil d’État avait initialement décidé de suspendre ces nouvelles règles, considérant que la situation inhérente au marché de l’emploi en France ne pouvait valablement pas permettre d’atteindre l’objectif du Gouvernement, qui était de réduire le recours aux contrats de courtes durées. Après quelques mois d’observation du marché de l’emploi français et des bons chiffres qui en ressortent, une évolution favorable ayant en effet été constatée, ces nouvelles règles peuvent finalement entrer en vigueur. La mise en oeuvre effective de la réforme se trouve donc dorénavant favorisée par l’amélioration significative du marché de l’emploi.
Une situation du marché du travail initialement incertaine
Par une ordonnance du 22 juin dernier (ordonnance n 452210), le juge des référés avait initialement décidé de la suspension de ces nouvelles règles de calcul inhérentes à l’allocation chômage et voulues par le Gouvernement. Ces règles devaient alors entrer en vigueur à compter du 1er juillet suivant. Toutefois, force était de constater que le juge des référés du Conseil d’État n’avait fait que remettre à plus tard l’entrée en vigueur de la réforme sans pour autant s’y attaquer dans son intégralité.
Pourquoi le juge des référés du Conseil d’État avait-il décidé ainsi à l’occasion de cette première ordonnance ? La réponse à cette question est simple : pour ce dernier, c’était alors la situation du marché de l’emploi français qui était jugée trop incertaine pour que ces nouvelles règles de calcul puissent, valablement et utilement, entrer en vigueur. Rappelez-vous, ces règles instaurées par le Gouvernement devaient permettre une stabilisation de l’emploi en France et ces dernières prévoyaient surtout une moindre indemnisation des salariés qui alternaient entre contrats de courtes durées et inactivité.
Le Gouvernement avait de ce fait pris acte de cette ordonnance et a, par la suite décidé de fixer une nouvelle entrée en vigueur de la réforme au 1er octobre 2021 (cf. décret n 2021-1251 du 29 septembre 2021). C’est pour contrer cette entrée en vigueur imminente que plusieurs syndicats avaient donc saisi le juge des référés du Conseil d’État en vue d’une exécution repoussée dudit décret.
Les conséquences de l’évolution de la situation du marché du travail sur l’entrée en vigueur des nouvelles règles
Plusieurs syndicats ont contesté l’opportunité de l’entrée en vigueur de cette réforme programmée au 1er octobre 2021. En effet, il s’agissait pour eux d’une contestation qui porte précisément sur une erreur manifeste d’appréciation au regard du choix de la date arrêtée par le Gouvernement. Ils recherchaient à obtenir de la part du juge des référés du Conseil d’État la suspension de l’inexécution du décret du 29 septembre 2021.
Le juge des référés du Conseil d’État a néanmoins décidé que le Premier ministre était légalement en mesure de décider d’une nouvelle date d’entrée en vigueur de ces nouvelles mesures de calcul de l’allocation chômage dès lors que celui-ci avait effectivement pris en considération l’évolution des conditions inhérentes au marché de l’emploi en France. Il est en ce sens observé par le juge des référés que la date arrêtée par le Gouvernement intervient à la suite d’une période d’observations de trois mois, pendant la période estivale, à la fois sur la base d’indicateurs économiques nouveaux et de l’évolution générale du marché de l’emploi.
À la lecture de l’ordonnance du juge des référés du Conseil d’État, prise en date du 22 octobre dernier, il est clair que la situation du marché de l’emploi et de l’activité économique a changé. En effet, ce dernier retient principalement que cette situation s’est améliorée au cours de l’été. Par voie de conséquence, ladite situation ne peut plus faire obstacle à l’entrée en vigueur de cette réforme et aux objectifs qu’elle poursuit, à savoir : la diminution du recours aux contrats de courtes durées, ce qui in fine permettra à de nombreux travailleurs de ne plus osciller entre périodes d’activité et d’inactivité.
De plus, le juge des référés a pu également relever que les demandeurs d’emploi continuent de bénéficier de certaines mesures, notamment des mesures d’accompagnement prolongées au bénéfice des demandeurs les plus éloignés de l’emploi ainsi que ceux qui désirent obtenir un poste durable (et non uniquement des contrats de courtes durées.)
Au vu de ces différentes constatations, le juge des référés du Conseil d’État a conclu que la contestation qui portait sur une erreur manifeste d’appréciation au regard du choix de la date arrêtée par le Gouvernement n’était pas sérieuse. De fait, le nouveau décret du 29 septembre 2021 n’est pas suspendu quant à son exécution.
Néanmoins, le Conseil d’État dans cette décision rendue en urgence a pris soin de souligner le fait qu’il rendra des décisions dans les semaines à venir concernant des recours portés « au fond » contre ladite réforme de l’assurance chômage.
Sources : Conseil d’État, Le Monde, Libération