La Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne
Son contenu : La Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne a été proclamée par les présidents du Parlement du Conseil et de la Commission lors du Conseil européen de Nice, le 7 décembre 2000. Elle comporte 54 articles et illustre la volonté de l’Union de se doter d’un catalogue de droits fondamentaux propres, et confirme à cette époque qu’une profonde rénovation de la protection des droits fondamentaux dans l’Union Européenne est engagée.
Ainsi, la Charte en attribuant un contenu précis aux droits fondamentaux visés dans le Traité de l’Union Européenne, donne corps au principe d’indivisibilité des droits de l’Homme en rassemblant dans un seul texte, six valeurs fondamentales ; dignité, liberté, égalité, solidarité, citoyenneté et justice. Elle rassemble également des droits individuels de nature différente : droits civils et politiques mais aussi des droits « nouveaux » avec la protection des données à caractère personnel, art. 8 ; principes de bioéthique, art. 3 ; droit à une bonne administration, art. 41. Des sociaux avec le droit de négociation et d’action collectives, le droit à des conditions de travail justes et équitables ou la protection de la santé et des droits spécifiques au citoyen européen, déjà reconnus dans le Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE).
Par ailleurs, selon la situation, les droits proclamés bénéficient soit à toute personne placée sous l’autorité de la juridiction d’un État membre, soit au seul citoyen de l’Union, soit au citoyen de l’Union et à toute personne résidant ou ayant son siège dans un État membre.
Sa portée : Le traité de Lisbonne du 1er décembre 2009 a donné à la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne « la même valeur juridique que les traités ». Ainsi, son respect s’impose dans le respect du principe de subsidiarité aux institutions, organes et organismes de l’Union dans le cadre de l’exercice de leurs compétences et aux États membres « uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union » (art. 51, § 1er). Autrement expliqué, la Charte est contraignante pour tous les États membres et tout citoyen peut s’en prévaloir en cas de non-respect de ces droits par un texte européen.
Néanmoins, des pays membres comme la Pologne et la République Tchèque ont négocié un régime dérogatoire à son application. Par ailleurs, le Royaume-Uni bénéficiait aussi de ce régime lorsqu’il était encore membre de l’Union Européenne.
La position des pays membres de l’Union Européenne face à l’IVG
L’interruption volontaire de grossesse est autorisée dans presque tous les pays européens. L’Irlande est le dernier pays de l’Union Européenne a avoir légaliser l’avortement en 2019 tandis que la Pologne en a fortement restreint la pratique et Malte totalement interdit.
24 pays membres de l’Union Européenne sur 27 ont légalisé ou dépénalisé l’avortement sans que la femme ayant recourt à une IVG n’ait à fournir d’explication. Pour avorter, le délai maximal varie de 10 semaines d’aménorrhée au Portugal à 24 semaines aux Pays-Bas. Toutefois plus de la moitié des pays autorisant l’IVG fixe cette limite à 12 semaines.
En France, la loi Veil de 1975 a autorisé l’IVG. Par ailleurs, depuis le 15 février 2017, le Parlement a définitivement adopté le « délit d’entrave à l’IVG ». L’objectif de cette loi est de s’attaquer aux sites de désinformation sur l’IVG ayant pour but de dissuader ou d’induire en erreur de manière intentionnelle les femmes souhaitant s’informer sur l’avortement.
Au Luxembourg, le 22 décembre 2014 l’avortement a été dépénalisé. Désormais, les Luxembourgeoises peuvent recourir à l’IVG dans un délai de 12 semaines après le début de la grossesse comme en France. Avant cette dépénalisation, l’IVG n’était autorisée qu’en cas de « détresse ».
Chypre autorise l’avortement jusqu’à 12 semaines de grossesses, sans avoir à justifier comme avant d’un risque pour la santé. Par ailleurs, en cas de viol ou d’inceste le délai est allongé à 19 semaines.
En Irlande, le 1er janvier 2019, la législation de l’avortement est entrée en vigueur. Elle autorise l’IVG sans conditions jusqu’à 12 semaines et 24 semaines dans les cas de « risque pour la vie » ou de « grave danger pour la santé » de la femme enceinte. Elle permet aussi l’avortement en cas d’anomalie du fœtus qui pourrait conduire à sa mort in utero.
En Scandinavie, la loi finlandaise autorise l’IVG avant 17 ans ou après 40 ans, après quatre enfants ou en raison de difficultés économiques, sociales ou de santé. En pratique, elle est aisée à obtenir.
À Malte, l’IVG est totalement interdite peu importe la situation. Risquent jusqu’à 3 ans de prison ferme ; les contrevenants, les femmes ayant avorté et les médecins ayant pratiqué une IVG.
En Pologne, depuis janvier 2021, l’IVG est uniquement autorisé en cas de viol, d’inceste ou de danger pour la vie de la mère. Après avoir tenté de l’interdire totalement en 2016, le gouvernement l’a restreint en supprimant la possibilité d’avorter en cas de malformation grave du fœtus, qui concernait 90 % des IVG dans le pays.
La position d’Emmanuel Macron face à l’IVG et le contexte dans lequel la proposition a été faite
Le mercredi 19 janvier 2022, Emmanuel Macron a proposé devant les eurodéputés les priorités de la France pour la présidence tournante du Conseil de l’Union Européenne. Le Président de la République a ainsi proposé de « consolider » la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne, en déclarant : « Je souhaite que nous puissions actualiser cette charte, notamment pour être plus explicite sur la protection de l’environnement ou la reconnaissance du droit à l’avortement. Ouvrons ce débat librement avec nos concitoyens de grandes consciences européennes pour donner un nouveau souffle à notre socle de droits ».
Les conséquences d’une modification de l’actuelle Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne : Ajouter au sein de cette Charte ce qui est déjà surnommé un « pacte Simone Veil » pour assurer un avortement « sûr et accessible » impliquerait une révision des traités selon la procédure ordinaire. Selon l’experte du droit européen Isabelle Bosse-Platière, « Dans la pratique, cette position politique et électoraliste me paraît assez illusoire » car le processus serait « très lourd, long et aléatoire du fait qu’il requiert l’unanimité des États membres ».