Une mesure qui ne fait pas consensus chez les parlementaires 

La co-rapporteuse de cette proposition de loi, l’écologiste Marie-Charlotte Garin, s’est facilité mardi 1er avril 2025 suite au vote favorable des députés sur ce texte. Celle-ci a en effet déclaré que « collectivement, nous avons acté que nous passions de la culture du viol, à la culture du consentement ». 

Ce vote ne signifie cependant pas que l’Hémicycle est unanime à ce sujet. En effet certains membres du Palais Bourbon redoutent que le fait d’inscrire la notion de non-consentement au sein de la loi pénale, et plus exactement de la définition du viol qu’elle détermine, cela n’aurait pour autre conséquence que d’axer l’enquête sur l’attitude personnelle de la victime. 

À ces craintes, les défenseurs de ce texte rétorquent que ce changement dans la loi pénale doit permettre de couvrir des situations qui, actuellement, sont difficilement appréhendées à l’image de l’exploitation d’une vulnérabilité de la victime. 

Ce texte transpartisan, qui est également soutenu par l’exécutif, doit permettre de prendre en compte non « pas ce que l’agresseur croit, mais ce que la victime veut  », selon Aurore Bergé, la ministre chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes. 

 

La redéfinition de l’article sur les agressions sexuelles

Il est à noter que cette proposition de loi est le résultat d’une mission d’information parlementaire. Cette proposition adoptée par les députés début avril doit dorénavant être discutée au Palais du Luxembourg. 

Cette proposition permet de remanier l’article inhérent aux agressions sexuelles, au titre desquelles se retrouve le viol. Ces agressions seraient redéfinies comme étant « tout acte sexuel non consenti » ; de même et de manière à apporter une aide non négligeable aux juges et avant eux aux enquêteurs, cet article préciserait ce qu’est ou non le consentement. 

Quel est contenu de ce texte spécifique ? « Apprécié aux regards des circonstances environnantes », « le consentement est libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable ». Aucune déduction de consentement ne saurait être « [déduite]du seul silence ou de la seule absence de réaction de la victime ». Pour le cas où l’acte « est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise » aucun consentement ne saurait être reconnu. 

L’ensemble des formulations retrouvées dans ce texte furent entérinées par le Conseil d’Etat et reprises telles quelles. 

 

Que prévoient les droits pénaux de nos voisins européens ?

Il est à noter que l’extrême droite, sous l’égide du Rassemblement National (RN) et l’UDR, a marqué sa nette opposition à cette proposition. Ainsi pour la députée RN Sophie Blanc, le viol tel qu’il est actuellement défini par le code pénal est « déjà suffisamment [précis] ». Sa collègue de l’UDR, Sophie Vaginay-Ricourt, considère pour sa part que les règles pénales ne doivent pas « s’aligner sur l’opinion ou la douleur, aussi légitimes soient-elles ». 

Ces critiques se retrouvent aussi de l’autre coté de l’échiquier politique, par exemple au sein du Parti socialiste qui a été divisé sur le sujet. Par exemple la députée socialiste Céline Thiébault-Martinez critique le manque de visibilité sur « son effet attendu », autrement dit une meilleure reconnaissance des victimes de viol, et a déclaré à ce sujet que  cette proposition pourrait pénaliser davantage ces mêmes victimes. Et celle-ci de conclure sue ces dernières feront l’objet d’interrogatoires « d’abord et avant tout sur leur consentement ». 

Cette crainte serait en vérité infondée compte tenu de ce que font déjà nos voisins européens comme le Danemark, la Suède ou encore l’Espagne, et chez lesquels la victime n’est pas positionnée « au coeur des audiences » selon Marie-Charlotte Garin. 

En outre le ministre de la justice, Gérald Darmanin, s’est prononcé sur le sujet et a déclaré qu’il doit revenir maintenant à l’auteur des faits poursuivi d’apporter la preuve « par des actes positifs » que celui-ci s’est effectivement assuré du consentement de la victime, soulignant néanmoins qu’aucune obligation de preuve positive ne doit être démontrée. L’enquête diligentée devra s’intéresser à l’auteur, et finalement à ce qu’il a compris à l’effet de s’assurer que la victime était d’accord, consentante. 

 

Quid du droit européen en la matière ?

Début 2024, l’exécutif européen avait, sans succès, proposé l’introduction d’un texte inhérent à une définition pénale européenne, commune entre les États membres concernant le viol. 

Les difficultés ont résidé au sein de la notion de consentement et plus exactement de la place dont celle-ci devait disposer dans cette définition. La France figure au titre des États membres qui s’y sont opposés, aux côtés entre autre de l’Allemagne ou bien encore de la Hongrie. 

Se pose la question de savoir pourquoi existe-t-il au jour des résistances de la part de certains États membres de l’Union européenne relativement à cette redéfinition juridique du viol et l’introduction de la notion de consentement dans cette même définition ? 

La première première explication que nous pourrions mettre en avant réside dans des différences à la fois culturelles mais aussi et surtout politiques entre ces États. 

Nous pourrions également évoquer la convention dIstanbul. Cette dernière est invoquée par lUnion européenne (la France l’a par ailleurs ratifié en 2014). Celle-ci a défini de manière positive la notion de consentement. Elle oblige les États parties à définir les dispositions pénales sur la base de la notion de non–consentement. Il sagit dun accord volontaire donné par une personne le tout en tenant compte des circonstances environnantes.

En outre, il existe au sein de lUnion européenne différentes manières de considérer et de définir la notion de viol. Par exemple, certains États ont fait le choix de baser uniquement leur définition du viol sur la violence ou la contrainte ; dautres États imposent de prouver le refus de la victime ; dautres enfin définissent le viol, comme étant constitutif de labsence de consentement libre et éclairé ainsi quen tenant compte des circonstances environnantes.

Reste à observer attentivement les débats qui auront lieu au Sénat concernant cette proposition de loi…

 

Références

https://www.vie-publique.fr/loi/297985-loi-consentement-definition-penale-du-viol

https://www.liberation.fr/societe/droits-des-femmes/lintroduction-de-la-notion-de-non-consentement-dans-la-definition-penale-du-viol-passe-son-premier-test-a-lassemblee-nationale-20250401_EB3P62JJY5FVNKXRHERJEBW7TA/

https://www.bfmtv.com/societe/l-assemblee-nationale-adopte-un-texte-qui-integre-le-non-consentement-a-la-definition-penale-du-viol_AD-202504010714.html

https://www.leclubdesjuristes.com/societe/lassemblee-nationale-adopte-en-commission-le-texte-modifiant-la-definition-penale-du-viol-10011/