Quels sont les faits et défense de Paul Watson ?
Paul Watson est un militant écologiste luttant contre la pêche de baleines. Ce dernier a été arrêté en juillet 2024 au Groenland alors que le Japon a effectué une demande d’extradition à son encontre. Il est actuellement en placé en détention, au moins jusqu’au 13 novembre prochain, date à laquelle il est attendu du gouvernement danois qu’il se prononce à ce sujet. Paul Watson a également fait savoir qu’il avait demandé à bénéficier de l’asile politique auprès du Chef de l’Etat français.
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Le 21 juillet dernier, alors qu’il se trouve au large du Groenland, qui dépend du Danemark, Paul Watson est arrêté suite à la relance d’une notice rouge d’Interpol que le Japon avait émis en 2012 (concernant des faits qui remontent pour leur part à 2010) dans le but d’obtenir son extradition. Si l’extradition est obtenue, alors Paul Watson sera jugé par la justice nippone. Pour information, cette notice constitue une demande adressée aux services de police dans le but de localiser un individu mais également de procéder à son arrestation en attendant une décision d’extradition à son sujet, la remise de cet individu, voire une autre mesure conforme au droit.
Pour en revenir aux faits, le Japon considère que Paul Watson est co-responsable d’infractions survenues à deux reprises en 2010 aux côtés de Peter Bethune, ancien camarade du militant écologiste.
Ce dernier avait été condamné à deux ans de prison avec sursis, suite à sa décision de plaider coupable des faits reprochés.
Les avocats de Paul Watson arguent que dans le cadre de la première affaire, « les membres de l’équipage [du baleinier nippon] ont été atteints » non pas par des gaz lancés par le défendeur mais « par leurs propres gaz ». Et d’ajouter que les images montrées permettent d’affirmer que l’incident en question s’est tenu bien avant que « la boule puante [ait] été lancée » sur le navire, et que le défendeur se trouvait précisément sur un autre bateau. Or il est reproché aux autorités de n’avoir visionné que les images émises par les japonais et non les images provenant de l’association Sea Shepherd, dont Paul Watson est l’un des co-fondateurs. Concernant le second incident, et pour lequel Peter Bethune avait plaidé coupable, les avocats de la défense ont énoncé que Paul Watson se trouvait également sur un autre navire et que l’ancien compagnon de route du militant écologiste s’était déclaré ainsi compte tenu des circonstances de son incarcération, tenant notamment à son strict isolement.
La crainte principale pour les conseils de Paul Watson, s’il est effectivement extradé, est que celui-ci « [subisse] des traitements inhumains » et que partant, il ne puisse bénéficier d’un procès équitable. Et un de ses avocats de rajouter que le Japon s’en prend ainsi à son client parce qu’il a « dénoncé le caractère illégal » de cette pêche.
Quid de sa demande d’asile politique auprès d’Emmanuel Macron ?
Le 16 octobre dernier, Paul Watson, maintenant établi sur le territoire national depuis de nombreuses années, a effectué une demande d’asile politique, dans une lettre adressée au Chef de l’Etat. Celle-ci fut par ailleurs rendue publique par Sea Shepherd France et l’on a pu y lire que le Japon « persécute » le défenseur des baleines pour un motif strictement politique, et en rien fondé en droit. Il est intéressant de noter qu’avant que ne soit finalement publiée cette lettre, la France avait expressément demandé aux autorités danoises de ne pas procéder à l’extradition de Paul Watson. Notons également que les autorités françaises, sous ce rapport, ont précisé que par principe, une telle demande d’asile effectuée ne peut valablement l’être que si l’individu qui en fait la demande se trouve déjà sur le territoire national.
Il est aussi intéressant de noter, outre cette demande d’asile politique, que Paul Watson a procédé à une demande de naturalisation. Jean-Noël Barrot, l’actuel Ministre de l'Europe et des Affaires étrangères français, avait fait savoir que les autorités compétentes étaient en train de l’examiner.
Une détention jugée « arbitraire » par les avocats de la défense
Au titre des griefs portés à l’encontre de cette détention, l’un des conseils de Paul Watson, a fait savoir que les Nations Unies seraient saisies de cette affaire médiatique mondiale, considérant cette dernière comme étant « arbitraire. » Selon lui, du fait des prolongations de détention prononcées à son encontre par les autorités groenlandaises depuis le début de son incarcération à l’été 2024, d’un point de vue pénal, ce constat ne saurait tenir. Pour lui, tout juge d’un Etat de droit comme le sont en effet le Groenland et le Danemark ne saurait valablement acquiescer cette situation, d’autant plus que les faits de l’espèce, d’une « vacuité totale », démontrent pour lui « la motivation politique (…) ».
Ce dernier a également précisé que les conditions de détention ont été durcies, soulignant notamment les difficultés rencontrées par le défendeur afin d’obtenir des appels téléphoniques : selon lui, il s’agit d’une méthode ayant pour dessein principal d’empêcher Paul Watson de communiquer avec des journalistes. La Président de Sea Shepherd France, Lamya Essemlali, avait également insisté sur la nécessité pour le ministre danois en charge du dossier de se prononcer rapidement sur la demande d’extradition formulée par les autorités nippones, qualifiant la détention de Paul Watson de « problématique ».
Il est également avancé par ses avocats que la notion de proportionnalité devra nécessairement être envisagée, c’est-à-dire la proportionnalité entre d’une part la détention provisoire dont il fait l’objet, d’autres part les infractions qui lui sont reprochées. A ce sujet, les autorités danoises ont déjà fait savoir que la demande d’extradition était en cours de vérification, et que l’enquête était actuellement en cours, sans pour autant partager de calendrier.
Outre la saisine des Nations Unies, il est de même envisagé de saisir la Cour européenne des droits de l’homme afin que les conditions de détention de Paul Watson fassent l’objet d’une décision. En sa qualité de membre du Conseil de l’Europe, le Groenland pourrait, du fait des « violations » alléguées contre lui, faire l’objet d’une décision par les juges européens.
Références
https://www.ouest-france.fr/environnement/protection-oceans/affaire-paul-watson-le-juge-a-refuse-de-visionner-nos-videos-pointe-sea-shepherd-6cbb5d6a-6ea6-11ef-8186-bc3b55f9d8c3
https://www.liberation.fr/environnement/biodiversite/affaire-paul-watson-le-defenseur-des-baleines-reste-en-prison-au-groenland-20241002_SFBOZSR4NBBCTALFMLGVIVOAVU/
https://www.nationalgeographic.fr/environnement/proces-de-paul-watson-un-tournant-decisif-pour-le-militantisme-environnemental-sea-shepherd-diplomatie
https://www.interpol.int/fr/Notre-action/Notices/Notices-rouges